La soirée dérape à Lausanne
Un politicien vaudois crie à l'agression homophobe dans un club

Vincent von Siebenthal, ex-président du Parti socialiste d'Épalinges, assure avoir été victime d'une agression homophobe par les agents de sécurité du Folklor Club, une boîte de nuit lausannoise. L'établissement dément fermement et dénonce le comportement du Vaudois.
Publié: 21.02.2023 à 16:54 heures
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Dernière mise à jour: 21.02.2023 à 16:55 heures
L'ancien élu a publié des photos de ses blessures sur Facebook.
Photo: Vincent von Siebenthal
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Cette publication Facebook a fait réagir jusqu'à la conseillère nationale socialiste vaudoise Brigitte Crottaz, au député socialiste au Grand Conseil Jean Tschopp et au conseiller municipal (exécutif) écologiste Maurice Mischler. En cause: Vincent von Siebenthal, ancien président du parti à la rose d'Épalinges (VD) et ex-élu au Conseil communal (législatif), assure — photos de ses blessures à l'appui — avoir été victime d'une agression homophobe. La scène se serait déroulée dans la nuit de samedi à dimanche, de la part d'agents de sécurités du Folklor Club, une boîte de nuit lausannoise.

Que s'est-il passé? Voici le récit publié par le Palinzard sur son profil: «Dimanche 19 février 2023, aux alentours des 3h du matin, j'ai été victime de la toute première agression homophobe de ma vie.»

Il détaille, visiblement estomaqué: «J'ai été brutalisé, traîné en haut d'un escalier et au sol, dans un endroit puant l'urine et autres excréments, par trois 'videurs' du club 'le Folklor', place de la Riponne 10, à Lausanne. Ces derniers m'ont insulté de 'pédale', 'sale pédé' et de 'fiotte' tout en me traînant en haut d'un escalier de service, à l'abri des regards bien entendu.»

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Appel au boycott

La suite? «On m'a amené quelqu'un prétendant être le responsable du club (ce dont je doute...), qui a couvert sans aucune ambiguïté les agissements de ses 'agents de sécurité', refusant de me croire et procédant même à du 'victime bashing' (classique), en cherchant à me décrédibiliser et à remettre en cause ma version des faits, en m'accusant d'autres actes ou paroles que je n'avais pourtant jamais commis ni prononcés.»

L'ex-responsable socialiste, qui écrit avoir déposé une plainte, conclut son texte par une bouteille à la mer: «Aidez-moi à faire en sorte que les coupables soient punis, en boycottant le 'Folklor Club', en partageant mon post et en avertissant toutes vos connaissances que des actes et paroles homophobes y sont commis, en plein cœur de Lausanne!»

Démenti catégorique du Folkor

Contacté par Blick ce mardi matin, l'établissement de la capitale vaudoise avance une tout autre version. «Les accusations proférées par Vincent von Siebenthal sont vivement contestées et ne représentent pas la réalité. M. Vincent von Siebenthal s'est endormi sur une chaise dans le club. Les membres de la sécurité ont dû le réveiller, compte tenu de son état physique. Ce dernier se trouvait, aux dires des membres de la sécurité, dans un état d'ébriété avancé.»

Toujours selon le Folklor, Vincent von Siebenthal, une fois réveillé, «aurait agressé un membre de [leur] équipe de sécurité, déclarant qu'il pouvait dormir s'il le souhaitait et qu'il faisait ce qu'il voulait dans ce club». La boîte de nuit poursuit: «Notre personnel de sécurité a poliment demandé à M. Vincent von Siebenthal de sortir prendre l'air, ce qu'il a refusé. Compte tenu de son agitation, les membres de la sécurité l'ont, cette fois, prié de quitter le club. Refusant d'obtempérer, il a été escorté jusqu'à l'extérieur de notre établissement via la sortie de secours.»

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«Qu'un politique puisse s'arroger le pouvoir de créer un esclandre au sein de notre établissement nous étonne au plus haut point»
La direction du Folklor Club
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L'histoire ne s'arrête pas là. «À ce moment-là, un membre de la direction a voulu s'entretenir avec lui. Il a fortement réagi, prétendant que le membre de notre direction, M. Thierry Namer, n'était pas le responsable du club. M. Vincent von Siebenthal s'est vivement énervé, refusant d'entendre raison. Des pluies d'insultes et de propos dénigrants ont été proférés contre les membres de la sécurité ainsi que le personnel du club, expliquant qu'il avait le pouvoir de virer les membres de notre personnel. Le dialogue a été impossible avec cet individu qui, furieux, a encore tenté de pénétrer à l’intérieur du club en sautant par-dessus la barrière. Notre équipe de sécurité a été contrainte de le maintenir pour le calmer.»

Par conséquent, la direction de l'établissement lausannois dit déplorer «profondément» cette attitude et conteste vivement les accusations Vincent von Siebenthal. «Au demeurant, nous nous questionnons qu'un politicien ait pu avoir une telle attitude, à l'égard de notre personnel, ainsi que de notre membre de la direction, M. Thierry Namer. Qu'un politique puisse s'arroger le pouvoir de créer un esclandre au sein de notre établissement nous étonne au plus haut point.»

Sur le fond donc, le Folklor nie que ses agents aient été les auteurs des blessures de Vincent von Siebenthal, «de même que les insultes homophobes qu'il prétend avoir reçues». «Nous sommes réellement attristés que M. Vincent von Siebenthal prétende que notre personnel de sécurité ait pu avoir un quelconque comportement inapproprié. Ce dernier est parfaitement formé à gérer ces situations et s'est toujours montré respectueux envers les clients de notre établissement. Notre établissement promeut des valeurs de tolérance et de respect des sexes et des genres.»

«Dégage, fils de pute!»

Au bout du fil, l'ancien membre de l'organe délibérant d'Épalinges soupire. «Cette ligne de défense ne me surprend pas, les videurs ont réagi de la même manière sur le moment. Tout comme le responsable, dont j'ai douté de sa fonction, puisqu'il a immédiatement pris fait et cause pour ses agents avant de me dire que je pouvais aller 'pleurnicher chez papa' si je n'étais pas content. Ce n'est pas une manière de traiter ses clients, d'autant plus quand ils sont victimes d'une agression.»

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«J'ai repris connaissance alors qu'on me traînait dans des escaliers»
Vincent von Siebenthal
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Dans les faits, Vincent von Siebenthal reconnaît s'être assis à un moment de la soirée, avoir appuyé la tête contre un mur et avoir brièvement fermé les yeux «pour se reposer». «Un agent est venu me demander de partir, ce que j'ai poliment refusé. Je ne dormais pas et j'avais payé mon entrée! Il s'est énervé et m'a lancé: 'Dégage, fils de pute!'»

L'ex-élu se serait levé pour protester avant de se rasseoir. «Un second sécu a rejoint le premier et ils m'ont secoué et mis des petites baffes. Puis, blackout. J'ai repris connaissance alors qu'on me traînait dans des escaliers, d'où les blessures dans mon dos et ma chemise déchirée. C'est là qu'ils ont prononcé les insultes homophobes. Maintenant, à la police de faire son œuvre. J'espère qu'elle aura accès aux caméras de vidéosurveillance, il serait fâcheux que l'enregistrement ne soit, étrangement, pas disponible.»

Une enquête en cours

Jointe par écrit, la police municipale de Lausanne confirme qu’une plainte a été enregistrée et que des investigations seront menées afin d’éclaircir les faits. Le Folkor, quant à lui, ne plie pas: «Nous nous réjouissons de coopérer avec les autorités de poursuite pénale et de faire toute la lumière sur cette affaire dans le but de démontrer que les faits décrits ne correspondent pas à la réalité.»

Le club confie par ailleurs qu'il se réserve le droit d'aller plus loin. «Nous examinons actuellement les possibilités d'actions judiciaires à l'encontre de M. Vincent von Siebenthal, compte tenu de la fausseté de ces accusations. Pour l'heure, nous souhaitons avant tout apaiser la situation et discuter avec M. Vincent von Siebenthal, pour lui rappeler le déroulement des faits, selon les témoins présents sur les lieux.»

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