Rencontre avec le Genevois qui monte
Théo Magnin: «Je dis oui et je fonce»

Qui est vraiment le très polyvalent Théo Magnin, le dernier pur produit de la formation genevoise à s'être imposé en première équipe? Pour Blick, le jeune homme de 20 ans avec les pieds bien sur terre revient sur ses débuts, ses ambitions et ses rêves.
Publié: 03.05.2024 à 17:59 heures
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Dernière mise à jour: 03.05.2024 à 18:37 heures
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Tim GuilleminResponsable du pôle Sport

Théo Magnin l'avoue: il n'est pas encore allé voir le film d'Yves Matthey consacré à la riche histoire du Servette FC. «Mais j'ai envie d'aller, c'est sûr!», assure ce jeune homme de 20 ans, qui est passé en quelques années de supporter du club grenat à joueur de la première équipe, réalisant le rêve de beaucoup de gamins genevois. Sur le grand écran de Cinélux, il sourira sans doute en comprenant pourquoi plusieurs fans du SFC le comparent déjà à Marc Schnyder, un homme avec lequel il partage une certaine élégance capillaire, en plus de l'amour de son club.

Alors qu'il vient de prolonger son contrat jusqu'en 2028, et que la saison en cours lui a permis d'ajouter deux belles lignes à son jeune CV (international suisse M21 et six matches européens avec Servette), le Genevois a pris, pour Blick, quelques minutes après l'entraînement du matin. L'occasion d'évoquer sa progression, sa polyvalence, mais aussi le joueur qu'il admirait le plus dans sa jeunesse… et qui est devenu son coéquipier!

Je viens de passer devant le parking du stade, où sont garées toutes les voitures des joueurs. Tu as prévu de monter en gamme avec ta prolongation de contrat?
Non, non, j'ai toujours la même, et ça ne va pas changer!

Théo Magnin veut s'inscrire dans la durée avec Servette.
Photo: Pius Koller

Mais c'est important pour un joueur professionnel, non? Une belle voiture pour changer de statut dans le vestiaire...
Non, ce n'est pas le plus important. Ce qui l'est, pour moi, avec ce contrat, c'est que je peux m'inscrire dans la durée à Servette. J'ai envie de faire de belles choses ici.

Que représente ce club pour toi?
Je viens au stade depuis tout petit avec mon père, ma mère... Toute ma famille! Pouvoir intégrer le club, dans un premier temps, puis jouer avec la première équipe, je ne vais pas te mentir: c'est un sentiment qu'il est difficile d'expliquer.

C'est quoi tes premiers souvenirs au stade?
La montée contre Bellinzone en 2011. J'avais 8 ans. A la fin, on était tous descendus sur le terrain...

C'est mal, il ne faut pas faire ça!
Bon, il y avait tout le monde ce jour-là (sourire). On avait attendu le coup de sifflet final. C'est mon premier souvenir. Cette montée, c'était beau.

C'était quel joueur qui te faisait rêver quand tu étais gamin?
Stevanovic.

C'était un peu plus tard, ça.
Oui, mais le joueur qui me faisait rêver au stade, c'est lui.

Mais du coup, quand tu te retrouves maintenant à devoir lui crier dessus pour qu'il se replace sur le côté droit, ça doit te faire un peu bizarre, non?
C'est sûr qu'il y a quand même une forme de respect envers lui, je ne vais pas le cacher! C'est un joueur spécial ici à Genève. Et c'est vrai que de pouvoir jouer avec lui, sur le même couloir en plus, ça me faisait quelque chose au début. Et en plus, c'est un super joueur, je n'ai même pas besoin de le préciser.

Tu te sens encore comme un jeune dans cette équipe? Ou avec tes deux prolongations de contrat, tu es désormais un joueur à part entière du SFC?
Ce n'est pas par rapport au contrat, mais plutôt par rapport au temps de jeu que j'ai eu cette saison. J'ai été blessé en première partie de championnat, mais j'ai quand même joué 20 matches jusque-là. Donc je me sens vraiment faire partie intégrante de l'équipe.

Tu arrives te rendre compte qu'il y a des gens qui viennent au stade aussi maintenant peut-être pour toi? Voire même qu'il y a des gens qui achètent ton maillot, sans être de ta famille?
Non, en vrai, je ne m'en rends pas encore compte. Je n'ai encore rien fait, donc je n'attends pas des choses comme ça, mais c'est clair que lorsqu'un petit me demande le maillot au stade, ce qui peut arriver, ça me fait bizarre. Mais je vais m'habituer (rires)!

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«Pouvoir jouer avec Miroslav Stevanovic, sur le même couloir en plus, ça me faisait quelque chose au début!»
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Il y a encore quelques années, un joueur de ton profil n'aurait peut-être pas prolongé à Servette, mais serait parti à YB ou Saint-Gall. Le fait que le club ait grandi a-t-il pesé dans ta décision?
Le club est redevenu hyper important en Suisse. Chaque année, on voit qu'il évolue, le niveau de l'équipe augmente. On a encore franchi un palier cette saison en coupe d'Europe. Franchement, c'est incroyable de revoir les gens au stade, tout cet engouement. Tout d'un coup, même dans la rue, tu vois des gens qui portent le maillot, beaucoup plus qu'avant. Et oui, pour revenir à ta question, c'est clair qu'il y a des réels objectifs ici: viser l'Europe, jouer le haut du classement. Il y a quelques années, on était un club qui venait de monter en Super League et un jeune qui voulait grandir devait peut-être partir. Aujourd'hui, un jeune comme moi peut s'épanouir dans les meilleures conditions, dans un des meilleurs clubs de Suisse. C'est le top. Donc oui, la situation a changé.

Il y a des gens qui t'arrêtent dans la rue des fois, ou c'est encore trop tôt?
Non, franchement, c'est rare (rires). Des fois je vois qu'on me reconnaît quand même, mais j'ai l'impression que les gens sont timides.

Sur la scène européenne, avec un mois de recul, quel sentiment domine? La fierté du parcours ou la frustration de ce match à Plzen?
La fierté. Après, sur le moment, juste après l'élimination dans un match si serré, c'est clair que ce n'est pas le cas... On aurait aimé aller plus loin, mais quand on regarde en arrière, on est fiers de ce qu'on a fait en Europe.

Photo: Pius Koller

Lors de ton dernier match, pour l'instant, tu sors à la mi-temps contre le SLO après 45 minutes très compliquées... Tu te dis quoi quand le coach te sort?
Que c'est normal. Même moi je pense que je me serais sorti à la pause!

C'est lucide...
Je n'étais pas bien rentré dans le match, je n'étais pas très bien. Voilà, c'est comme ça. Ça fait partie de l'apprentissage. Mais ça m'embête, parce que pour une fois que je jouais latéral droit, j'avais particulièrement à coeur de bien faire.

Parce que latéral droit, tu considères que c'est ton poste?
Oui, j'y ai fait toute ma formation. C'est à partir de cette saison que je joue plus haut. Ou au milieu de terrain. Ou latéral gauche.

Ou défenseur central...
Oui, ça je n'aurais jamais pensé!

Tu le prends comment?
Comme un signe de la confiance du coach. Et je vais te dire: même s'il me sort à la mi-temps, je sais que ça ne change rien. Je suis motivé pour faire encore mieux et je sais que je dois encore beaucoup m'améliorer.

Il ne le fait pas qu'avec toi: Bendeguz Bolla, par exemple, joue à plusieurs postes. René Weiler dit parfois en conférence de presse qu'il aime les joueurs polyvalents, intelligents. Visiblement, il te considère ainsi. Toi, ça te perturbe plus qu'autre chose, de jouer à des postes différents? Ou tu te dis que c'est une arme en plus?
C'est une possibilité d'apprendre, surtout! Je suis jeune, j'ai envie de jouer, de progresser. Donc que le coach me dise d'aller au milieu, derrière, sur le côté, à gauche, à droite... Je dis oui et je fonce! Je m'appuie aussi sur les conseils de mes coéquipiers pour vite m'adapter à mon nouveau rôle et faire la meilleure performance possible. J'engrange de l'expérience. Jouer au milieu, c'est totalement différent de sur le côté. Et ça te permet de penser différemment. Quand je suis au milieu, je me dis: quelle course j'aimerais que le latéral fasse? On peut se mettre dans la peau d'autres joueurs, c'est formateur.

A l'entraînement aussi, il te met partout? Ou là tu peux être latéral droit uniquement?
Ça dépend de l'équipe avec laquelle je joue. Là aussi, ça varie.

Mais finalement, c'est une belle preuve de confiance, non? Le latéral droit de Servette, c'est peut-être le meilleur de Suisse, ou en tout cas l'un des meilleurs, Keigo Tsunemoto. Le fait que René Weiler te cherche un autre poste, c'est parce qu'il veut que tu joues, non?
Oui, il me l'a dit, d'ailleurs. Quand je suis revenu de blessure, il m'a dit qu'il voulait me faire jouer, mais qu'il y avait Tsunemoto qui performait bien et je l'ai totalement compris. Du coup, contre Stade-Lausanne-Ouchy en Coupe de Suisse, j'ai joué un cran plus haut à droite. Et après, il m'a mis deux matches à mi-terrain, parce que Gaël Ondoua était suspendu. Il a bien aimé et, bam, il m'a lancé, il ne s'est pas posé de questions et moi non plus. Au final, ça s'est bien passé et, oui, je le prends comme une preuve de confiance et comme le fait qu'il a envie de me faire jouer. Peu importe où.

Photo: Martin Meienberger/freshfocus

Contre Ludogorets au match aller, tu es partout, tu voles sur le terrain. Je te nomme homme du match, avec une bonne note. Contre le SLO dernièrement, je te désigne comme pire joueur du match, avec une note catastrophique. Ça te touche, ce que pensent et ce qu'écrivent les journalistes?
Non, en vrai, tu me l'apprends. Je n'avais même pas vu, très franchement. Mais ça ne me touche pas tellement, parce que je pense que j'ai une assez bonne capacité d'autocritique. Je sais quand je suis bon et quand je ne le suis pas... et le staff me le dit. Je ne prends pas forcément en compte les avis extérieurs, même si, quand je fais un bon match, j'aime bien lire les avis positifs (rires)!

Tu as des gens autour qui peuvent te ramener sur terre, au cas où tu prenais la grosse tête? Même si je n'ai pas l'impression que ce soit un risque chez toi...
Pas forcément... En vrai, j'ai assez les pieds sur terre, en effet. Souvent, ma mère m'envoie des jolis messages qu'elle a lu sur Facebook par rapport à moi. Elle m'envoie, elle m'envoie, elle m'envoie... C'est gentil! Elle est à fond sur Facebook, mon père aussi. C'est plus sympa qu'autre chose.

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«Que le coach me dise d'aller au milieu, derrière, sur le côté, à gauche, à droite... Je dis oui et je fonce!»
»

Tu as des rêves dans le foot? Autre que jouer à Servette, je veux dire.
J'aimerais bien jouer en équipe nationale A. Et puis, essayer d'aller le plus loin possible, tout simplement. Et ça passe par le fait de devenir titulaire à Servette, de m'imposer comme un cadre. Et après, on verra où le vent m'emmènera. Peut-être que je ferai toute ma carrière ici, peut-être pas. Mon objectif c'est d'être à fond ici et m'épanouir à Genève.

Tu as fait une formation à côté?
J'ai fini le collège, j'ai eu ma matu.

Donc tu peux t'inscrire à l'Uni, théoriquement. Tu vas le faire?
Non, là, je vais me consacrer à fond au foot. Je m'étais mis comme objectif de terminer mes quatre ans de collège pour avoir ce papier. Mais je n'avais pas forcément de but derrière dans l'immédiat.

Tu es un malade de foot, tu suis tous les championnats, tu connais les 25 joueurs de Saint-Gall?
Le championnat de Suisse, oui, je connais bien. Je regarde aussi la Premier League. Quand j'ai du temps libre, je regarde souvent des matches.

L'Etoile-Laconnex, ton premier club, tu les suis encore?
Ça fait un petit moment que je ne suis pas retourné, mais oui, j'y vais régulièrement. Je vais aller voir un entraînement bientôt, j'ai des potes qui jouent encore là-bas. C'est toujours spécial pour moi d'y aller. Des fois, je vais aussi jouer au foot là-bas le dimanche.

Tu iras accrocher ton premier maillot de l'équipe de Suisse A à la buvette...
Oui, c'est clair, c'est une bonne idée, j'avoue! Mais j'ai du chemin à faire encore.

Credit Suisse Super League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
FC Lugano
FC Lugano
6
4
13
2
Servette FC
Servette FC
6
-3
12
3
FC Zurich
FC Zurich
5
6
11
4
FC Lucerne
FC Lucerne
6
4
11
5
FC Bâle
FC Bâle
6
9
10
6
FC St-Gall
FC St-Gall
5
5
10
7
FC Sion
FC Sion
6
4
10
8
Yverdon Sport FC
Yverdon Sport FC
6
-4
5
9
Grasshopper Club Zurich
Grasshopper Club Zurich
6
-4
4
10
FC Lausanne-Sport
FC Lausanne-Sport
6
-7
4
11
FC Winterthour
FC Winterthour
6
-7
4
12
Young Boys
Young Boys
6
-7
3
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