Le monde à l'envers à Windisch
Le canton d'Argovie veut payer un avocat aux locataires dont le bail a été résilié

Les habitants de Windisch (AG) ne savent plus s'il faut rire ou pleurer. Les 49 locataires dont le contrat de location a été résilié au profit de l'accueil de requérants d'asile ont reçu une nouvelle lettre du canton avec une information plutôt… surprenante.
Publié: 10.03.2023 à 18:13 heures
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Dernière mise à jour: 10.03.2023 à 18:42 heures
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Ralph Donghi

«Qu’est-ce qu’ils veulent encore?» Julia Adams, 39 ans, soupire en ouvrant une nouvelle lettre reçue du canton, à Windisch. En février, cette mère de famille avait également reçu une lettre de l’administration argovienne pour l’informer que son contrat de location allait être résilié… au profit de l’accueil de requérants d’asile.

La bientôt quarantenaire craint une autre mauvaise nouvelle avec ce courrier supplémentaire. «Pas encore s’il vous plaît», murmure-t-elle, assise dans la cage d’escalier devant son appartement.

Surprise: dans la missive datée du 8 mars 2023, le département de la santé et des affaires sociales annonce la création d’un «centre d’accueil pour les locataires» des immeubles Zelglistrasse 9 et Mülligerstrasse 11 et 13. «Pour traiter vos demandes en tant que locataire», le service social cantonal a mandaté un bureau d’avocats. Et le courrier précise: «Les frais de travail des avocats sont pris en charge par le Service social cantonal.»

Julia Adams, dans sa cage d'escalier à Windisch, lit la dernière lettre qu'elle a reçue de la part du canton.
Photo: Ralph Donghi
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«C’est grotesque!»

Julia Adams ne sait pas si elle doit rire ou pleurer. «Je commence à n’y plus rien comprendre, confie-t-elle à Blick. D’abord, le propriétaire résilie notre contrat de location pour que le canton puisse ouvrir ici un centre d’asile pour 100 personnes. Et maintenant, ce même canton nous paie un avocat pour qu’il puisse agir contre ses propres intérêts. C’est grotesque!»

La scientifique ne peut s’empêcher de s’interroger. «Ce cabinet d’avocats défend-il vraiment nos besoins?»

Avec son mari Michael et leurs enfants Finja, Johannes et Norina, Julia fait partie des 49 locataires qui ont reçu une résiliation de leur contrat de location d’ici à fin juin et septembre. La détresse des habitants concernés ne s’est pas fait attendre. «Les enfants ont pleuré», avait alors confié Julia.

La commune s’est également montrée horrifiée, en particulier la maire UDC Heidi Ammon. Elle s’était alors insurgée auprès de Blick: «Je ne comprends pas que l’on puisse prononcer de telles résiliations de contrats.»

Le canton ne savait pas que des familles y vivaient

Face au tollé qu’a provoqué l’affaire, le conseiller d’État argovien et UDC Jean-Pierre Gallati a reconnu avoir commis des erreurs et a demandé «pardon aux personnes concernées et au conseil communal de Windisch». Lors de l’examen de l’immeuble, le service social cantonal n’a pas tenu compte des conséquences des résiliations de contrat, a-t-il expliqué. Il n'aurait pas eu conscience qu’il s’agissait de grands appartements, dans lesquels vivent des familles.

Finalement, le canton a déclaré vouloir trouver une solution pour les personnes concernées avec la commune et le propriétaire de l’immeuble. Le bailleur et le canton seraient en principe prêts à laisser les locataires des grands appartements y vivre plus longtemps – jusqu’à ce qu’ils aient trouvé un nouveau logement.

Selon la dernière lettre du canton, trois personnes morales «sont à la disposition des locataires en tant que personnes de contact». «Elles examinent vos demandes, les coordonnent avec le bailleur et le service social cantonal et tentent de trouver des solutions», peut-on lire dans le dernier courrier administratif. Les habitants sont invités à ne pas hésiter à contacter le centre d’accueil. Avec une précision: «Veuillez noter que la correspondance doit être rédigée en allemand.»

«Nous préférons dépêcher nous-mêmes un avocat»

Dans sa lettre, le canton se dit «convaincu que nous pouvons vous soutenir dans la présente procédure de résiliation avec notre offre de conseil». En outre, il s’y excuse «encore une fois pour les désagréments que [les locataires ont] subis». Avec la mise en place du centre d’accueil, «nous [leur] offrons le meilleur conseil possible dans le cadre de nos possibilités».

Julia Adams, comme tous les locataires auxquels Blick a posé la question, est formelle: «Nous préférons dépêcher nous-mêmes un avocat qui nous représentera tous ensemble. Et surtout, nous voulons rester dans nos appartements!»


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