Un haut gradé de l'armée ukrainienne
La situation «détruit le mythe d'une armée russe forte»

Avant l'invasion russe commencée le 24 février, personne ne croyait que l'Ukraine pouvait tenir tête aux forces armées de sa voisine. Le chef des services secrets ukrainiens explique à quoi cela est dû et ce qu'il faudrait pour remporter une victoire contre la Russie.
Publié: 19.04.2022 à 06:14 heures
Martin Bruhin

L'avancée russe a d'abord été stoppée, puis les forces armées ont échoué à prendre la capitale ukrainienne, Kiev. Désormais, le navire amiral de la flotte russe de la mer Noire, le Moskva, a lui aussi été coulé par des missiles anti-navires ukrainiens.

«Cela réfute une fois de plus le mythe de la puissante armée russe», affirme le chef du service de renseignement militaire ukrainien, le major-général Kyrylo Boudanov, dans un entretien au magazine allemand «Der Spiegel».

Un «manque de professionnalisme»

Les forces armées russes se sont regroupées entre-temps à l'est du pays pour y concentrer leur offensive. Que le plan d'attaque initial de Vladimir Poutine ait échoué n'étonne pas Kyrylo Boudanov. «Ce qui m'étonne, c'est autre chose: l'incompétence et la négligence avec lesquelles les commandants russes ont abordé la réalisation d'une opération aussi importante», lâche-t-il.

Jusqu'à présent, l'avancée de l'armée russe ne s'est pas déroulée comme prévu.
Photo: keystone-sda.ch
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Le militaire ukrainien est convaincu que les commandants partaient du principe qu'ils pourraient prendre le pouvoir en Ukraine en trois jours: «Les dirigeants russes doivent s'interroger sur la compétence de leurs généraux.» Le fait que huit de ces derniers soient déjà tombés aurait également amené les Ukrainiens à se poser la question: «Nous n'avons trouvé qu'une seule réponse: les généraux manquent de professionnalisme.»

«Une signification purement symbolique»

Outre les nombreux soldats et généraux morts, Kyrylo Boudanov cite un autre exemple de l'échec de Moscou: l'armée russe avait positionné à plusieurs reprises du matériel militaire non loin d'un aérodrome près de Kherson. À chaque fois, il a été détruit par l'armée ukrainienne (quinze fois au total). C'est un «monument d'idiotie», commente le militaire ukrainien.

Kyrylo Boudanov tempère aussi la réputation des combattants tchétchènes. Selon lui, ils ne sont pas aussi forts que ce que tout le monde croit. «Ils ont une signification purement symbolique», analyse-t-il. Les Tchétchènes n'auraient en effet participé à aucune action de combat d'envergure: «Ils étaient toujours derrière le front pour piller, violer ou tuer.»

L'Ukraine veut reconquérir la Crimée

Jusqu'à présent, l'armée ukrainienne a tenu tête à la Russie. Mais pour qu'elle puisse continuer à réussir, elle a besoin d'urgence d'armes de la part de l'Occident, notamment de systèmes d'artillerie, assure Kyrylo Boudanov. «Malheureusement, nous avons besoin de chars, car nous avons subi de très grosses pertes en véhicules blindés», détaille-t-il.

Pour pouvoir libérer les territoires occupés, il faut des armes lourdes. Selon Kyrylo Boudanov, la péninsule de Crimée, annexée par la Russie en 2014, fait également partie de ces territoires. Le dirigeant militaire ukrainien ne sait pas combien de temps la Russie pourra encore maintenir son siège, ni combien de temps l'Ukraine pourra résister à l'attaque. Mais «plus le reste du monde parviendra à agir de concert sur cette question, plus vite les ressources (ndlr: de l'envahisseur) s'épuiseront. En outre, je ne peux que dire que l'Ukraine existait avant cette attaque, qu'elle existe maintenant et qu'elle existera à l'avenir. Poutine ne peut rien faire contre cela.»

(Adaptation par Louise Maksimovic)

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