Les Houthis attaquent des navires marchands
L'escalade en mer Rouge pourrait avoir de graves conséquences sur l'Occident

La mer Rouge est en ébullition. Dans la nuit de jeudi à vendredi, les Etats-Unis et leurs alliés ont riposté aux attaques des rebelles yéménites Houthi. Ces derniers jurent de se venger. Blick vous explique pourquoi la situation pourrait s'embraser rapidement.
Publié: 13.01.2024 à 06:11 heures
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Dernière mise à jour: 13.01.2024 à 09:12 heures
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Chiara Schlenz

Pendant des mois, les Etats-Unis ont averti, menacé, attendu — mais c'est désormais chose faite: dans la nuit de jeudi à vendredi, les troupes américaines, britanniques et néerlandaises ont attaqué des positions des rebelles houthis au Yémen. Encore tôt samedi, les deux forces occidentales ont mené des raids. La chaîne des Houthis, al-Masirah, a fait état de frappes sur au moins un site de la capitale Sanaa. «L'ennemi américano-britannique cible la capitale, Sanaa, avec un (certain) nombre de raids», a communiqué al-Masirah sur son compte X, citant son correspondant dans la ville. Puis, le Commandement militaire central des Etats-Unis (Centcom) a confirmé une frappe américaine vers 03H45 locales samedi (00H45 GMT) «contre un site radar au Yémen».

Cette attaque est la réaction militaire la plus violente à la campagne continue des Houthis qui, depuis le début de la guerre de Gaza, attaquent des navires marchands en mer Rouge avec des drones et des missiles. Comment en est-on arrivé à cette escalade?

Qui sont les rebelles houthis?

Le mouvement houthi, également connu sous le nom d'Ansarallah (partisans de Dieu), est un parti politique actif dans la guerre civile yéménite qui fait rage depuis près d'une décennie. Il a été fondé dans les années 1990 par son chef Hussein al-Houthi. L'Iran soutient les rebelles. Selon un rapport du Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS) datant de 2021, l'Iran a fourni au groupe des armes et des technologies, notamment des mines marines, des missiles balistiques et de croisière, ainsi que des drones.

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont lancé une attaque contre les rebelles houthis au Yémen, notamment avec des avions de chasse «Typhoon».
Photo: keystone-sda.ch
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Les Houthis font partie de ce que l'Iran appelle «l'axe de la résistance», une alliance anti-israélienne et anti-occidentale de milices régionales. Avec le Hamas dans la bande de Gaza et le Hezbollah au Liban, les Houthis sont l'une des trois milices proéminentes soutenues par l'Iran.

Pourquoi attaquent-ils les navires marchands occidentaux en mer Rouge?

Depuis novembre, les rebelles houthis ont mené 27 attaques de missiles et de drones contre des navires en mer Rouge et dans le golfe d'Aden. Lorsque la guerre entre Israël et le Hamas a commencé le 7 octobre, les Houthis ont déclaré leur soutien au Hamas et ont affirmé qu'ils attaqueraient tout navire se rendant en Israël ou le quittant.

Les attaques des rebelles pourraient avoir pour but de causer des dommages économiques aux alliés d'Israël, dans l'espoir de faire pression sur Israël pour qu'il cesse ses bombardements sur Gaza.

Qu'est-ce que cela signifie pour le commerce mondial?

La situation en mer Rouge a de graves répercussions sur l'économie mondiale. Le canal de Suez voit passer à lui seul 12% du commerce mondial et 30% du trafic international de conteneurs. Quatre des cinq plus grandes compagnies maritimes du monde — Maersk, Hapag-Lloyd, CMA CGM Group et Evergreen — ainsi que des géants du pétrole comme BP ont suspendu le trafic maritime à travers la mer Rouge par crainte d'attaques des Houthis.

Ces attaques pourraient contraindre les navires à emprunter une route beaucoup plus longue pour contourner l'Afrique. Cela pourrait faire grimper les coûts liés au transport. Les entreprises pourraient alors répercuter l'augmentation des coûts sur les consommateurs. Résultat: les marchandises pourraient devenir encore plus chères qu'elles ne le sont déjà.

Comment réagissent les États-Unis et leurs alliés?

Le gouvernement américain dirigé par Joe Biden, a condamné à plusieurs reprises les attaques des Houthis en mer Rouge et a mis sur pied une force d'intervention navale pour les tenir en échec. Cette task force, à laquelle participent les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres alliés, patrouille en mer Rouge.

Les États-Unis ont mené dans la nuit de jeudi à vendredi, en collaboration avec la Grande-Bretagne, des frappes aériennes contre des positions houthies au Yémen. C'est ce que confirme la Maison Blanche. Il s'agit d'une «réaction directe aux attaques sans précédent des Houthis contre la navigation internationale en mer Rouge». Plusieurs cibles auraient été attaquées, notamment par des avions de combat.

Avec quelles armes se battent-ils?

Les États-Unis combattent entre autres avec les missiles d'attaque terrestre Tomahawk (TLAM). Il s'agit de missiles de croisière volant à basse altitude et capables de transporter une ogive conventionnelle de 500 kilos à des centaines de kilomètres à l'intérieur des terres. Les Tomahawks sont très précis et, comme ils sont guidés par GPS, ils peuvent changer de cible ou de trajectoire après le décollage en fonction des besoins, peut-on lire dans une fiche technique de la marine américaine. Ils sont tirés depuis le sous-marin nucléaire lanceur de missiles USS Florida.

Selon les informations du Pentagone, outre l'USS Florida, des navires de guerre américains ont également utilisé des Tomahawks contre les Houthis. L'épine dorsale de la flotte de surface de la marine américaine est constituée par les destroyers à armes guidées de la classe Arleigh Burke, dont près de 70 sont en service. La Grande-Bretagne a combattu les rebelles houthis dans la nuit de jeudi à vendredi avec des avions de combat Typhoon. Ces jets bimoteurs à un seul pilote sont un pilier important de la flotte aérienne britannique. Selon une fiche technique de la Royal Air Force, ils volent à des vitesses supersoniques (jusqu'à Mach 1,8) et à une altitude pouvant atteindre 16'764 mètres.

Shashank Joshi, rédacteur militaire du magazine britannique «The Economist», mentionne l'utilisation d'armes Oerlikon sur le navire de guerre britannique HMS Diamond. Le croiseur a d'abord utilisé des missiles anti-aériens franco-italiens contre les drones houthis, explique le journaliste en citant des sources militaires non identifiées sur X: «Certains des drones se sont rapprochés du navire et ont forcé le HMS Diamond à utiliser ses canons Oerlikon de 30 mm», poursuit l'expert militaire.

La situation au Proche-Orient est-elle en train de dégénérer?

En donnant l'ordre d'effectuer des frappes aériennes sur des cibles houthis au Yémen, Joe Biden a franchi un pas qui compromet désormais l'un des principaux objectifs de sa propre politique au Moyen-Orient: éviter une guerre régionale. Il reste à voir dans quelle mesure la situation en mer Rouge et au Yémen aura des répercussions sur le reste de la région.

Certains alliés occidentaux au Moyen-Orient, dont les États du Golfe que sont le Qatar et Oman, avaient exprimé leurs craintes que les frappes contre les Houthis ne deviennent incontrôlables et n'entraînent la région dans une guerre plus vaste avec d'autres supplétifs de l'Iran comme le Hezbollah au Liban et les milices soutenues par Téhéran en Syrie et en Irak.

Les Houthis ont réagi aux attaques en déclarant que «les États-Unis et la Grande-Bretagne doivent être prêts à payer un prix élevé et à assumer les graves conséquences de leur agression». L'Iran et le groupe terroriste Hamas ont également fermement condamné l'attaque militaire contre les rebelles houthis au Yémen. Vendredi, le général Douglas Sims, de l'Etat-major américain, a affirmé à la presse que les Houthis avaient tiré un missile anti-navire «en riposte» aux frappes des Etats-Unis et du Royaume-Uni sur les positions du mouvement rebelle au Yémen.

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