Avec ses burgers japonais
Ex-championne du monde des sandwiches, Ivalú Acurio signe les burgers les plus tendance de Genève

Ivalú Acurio, fille du prestigieux chef Gastón Acurio, vient de lancer, dans le nouveau food court genevois Spoon Food Hall, un concept mêlant burgers et gastronomie japonaise. Rencontre avec une jeune femme ambitieuse et déterminée.
Publié: 21.05.2022 à 12:17 heures
|
Dernière mise à jour: 23.05.2022 à 09:52 heures
Nouhad Monpays

Il y a décidément des choses à dire sur le Spoon Food Hall, nouveau food court genevois que j'ai arpenté pour «Blick» à plusieurs reprises. Outre les délicieux plats de street food que l'on peut y acheter, il y a parmi les talents culinaires des lieux une personnalité à découvrir: Ivalú Acurio. Elle est facile à reconnaître avec sa chevelure interminable, et son sourire communicatif qui accueille les clients chaque midi au comptoir de Sando, où l'on peut se régaler de très copieux burgers aux accents nippons.

Issue des bancs de l’École hôtelière de Lausanne, cette jeune femme solaire n’est autre que la fille de l’un des plus fervents défenseurs et ambassadeurs de la gastronomie péruvienne en Suisse, Gastón Acurio (derrière des adresses internationales telles que Astrid y Gastón, La Mar, 7, les tous nouveaux restaurants Manko ou encore Yakumanka, à Genève).

La pression de l'héritage

La jeune femme arrive à notre rencontre avec son backpack et un bob lilas et rose vissé sur la tête: un style années 80 aux coloris pop, énergique, jeune, très japonais - tout comme ses burgers - qui contraste avec la douceur de ses traits. Elle s'exprime en anglais mais comprend parfaitement les questions posées en français.

Ivalú Acurio signe des burgers d'inspiration japonaise dans son stand genevois, Sando.
Photo: Nouhad Monpays

Sans être timide, Ivalú hésite à répondre à ma sollicitation quant à son illustre père. Elle n’aime pas que l’on fasse continuellement le lien avec papa et justifie avec un sourire un peu gêné: «Oh, maintenant j’ai grandi tu sais, c’est vrai que c’est une énorme pression, mais aujourd’hui [Ndlr: à 28 ans], je sais que la cuisine, la restauration, c’est en moi, mon travail c’est 80% de ma vie, et j’ai plein de choses à exprimer».

D’ailleurs, Ivalú précise, la «pression» ne vient pas seulement du côté de papa, mais aussi de celui de sa mère: «Ma maman - qui est allemande - est une super badass, si tu savais…En plus, elle cuisine aussi divinement bien, les desserts péruviens en particulier.» L’univers médiatique l’oublie parfois, Astrid (d'où le nom des restaurants Astrid y Gastón) est pour beaucoup dans le succès de son mari. Quant au sujet de la gastronomie allemande, Ivalú rit…On n'évoquera pas le sujet: elle n’est pas fan de la choucroute, préférant la cuisine du Pérou: «Lima est pour moi l’une des capitales de la gastronomie mondiale», affirme avec conviction Ivalú.

Elle a préféré venir accompagnée de son acolyte, «mon boss» précise-t-elle en souriant. Ce boss, c'est Yoss Kakinuma, autre «fils de» puisqu'il est fils du chef Shinya Kakinuma, du restaurant de sushis éponyme (une étoile Michelin, et noté 14/20 au Gault & Millau).

Ivalú Acurio et Yoss Kakinuma
Photo: Nouhad Monpays

Tous deux ont été formés dans l’une des plus célèbres écoles hôtelières du monde: l’EHL. Ils ne se sont pas rencontrés sur les hauteurs lausannoises, mais à Tokyo lors d’une réunion d'anciens élèves. L’un et l’autre m'expliquent alors, le lien entre les alumnis qui fait fi des frontières et qui favorise les synergies de talents.

Championne du monde de sandwiches

Ivalú est née à Lima, a étudié en Suisse, puis est partie vivre à Tokyo pour six mois d’école de cuisine qui sont finalement devenus trois ans. «L’amour de la culture et de la nourriture, dit-elle, Tokyo est dingue pour cela!».

«Un amoureux et le Covid y sont aussi pour beaucoup», ajoute-t-elle avec le sourire. Ivalú est finalement revenue en Suisse, à Genève cette fois, avec des projets plein la tête et sous le bras, le fameux amoureux, un jeune Germano-japonais rencontré à Tokyo.

Ivalú l’avoue, le grand écart entre Genève et Tokyo est difficile, mais la situation géographique de la Ville du bout du lac lui permet toutes les folies telles qu'«aller manger les weekends dans toute l’Europe. A Madrid que j’adore ou à Paris, par exemple». Et la jeune femme de préciser: «À Genève, il y a encore de la place pour toutes mes idées, plein de choses n’ont pas encore été faites.» C'est alors que commence l'histoire de Sando.

La jeune femme a opté pour une carte axée sur les burgers: «Nous avions 1500 idées en tête, mais nous avons adapté le projet à la demande de cet espace de restauration. Il ne manquait que des burgers.» Sando est ainsi né avec des recettes pensées par Ivalú. La jeune femme ne part pas de rien: on rappelle qu’en 2016 elle s’était distinguée en remportant la coupe du monde des sandwiches avec sa déclinaison du sandwich péruvien traditionnel, le chimbobo, rebaptisé El Chimbobazo.

Elle revisite la street food japonaise

À Genève, Ivalu met à profit sa connaissance des sandwiches et de la gastronomie japonaise et laisse libre cours à sa créativité. Ses shokubuns, sont par exemple, une déclinaison du shokupan (pain traditionnel japonais) ici pimpés avec un aspect brioché. Et ces drôles de frites? Une déclinaison plus locale cette fois, plus comme un rösti, m’explique Yoss.

Elles sont accompagnées d’une petite sauce bien goûteuse nommée Umami (du nom de la cinquième saveur), revisite d’une sauce typique de la street food japonaise avec de l'algue séchée de deux types et de la sauce barbecue Okonomiyaki. Dans son stand, Ivalu propose seulement trois recettes plus une variation de l’une d’elles: «pour faciliter un débit intense et être au point sur la qualité», m’explique-t-elle.

Comme son sourire, l'avenir d'Ivalú semble radieux. Si elle a l'air de faire les choses avec légèreté, ce n’est qu’une apparence, car elle a le goût du travail et de l’effort. La jeune femme explique être présente sur le stand tous les jours, «le temps de former les équipes». Elle avoue, presque à regret, n’avoir pour le moment confiance qu’en elle pour bien faire tourner le stand «comme je veux», mais elle semble confiante pour la suite.

La suite? Quelle suite? «Un restaurant en ville, dit-elle avec détermination, je veux ouvrir plein de Sando…Enfin, se ravise-t-elle, déjà un restaurant.» C’est en cours, et elle nous y promet au moins 10 recettes différentes. La jeune femme ne se met pas de limites: «Pourquoi pas à Zurich? C’est une ville très cool. Et puis pourquoi ne pas ouvrir plein d’autres concepts sympas ensuite?».

Mais, une question me taraude: est-ce que ces burgers représentent vraiment son style culinaire? Ivalú rit une fois encore: «C’est une partie de moi. Mais un jour j’aurais mon propre restaurant qui montre mieux qui je suis. Un restaurant «Ivalú style», qui sera un mix de ma collection de voyages, peut-être une cuisine d’inspiration péruvienne, coréenne et japonaise: plein de saveurs asiatiques, c’est sûr! Ce sera un endroit qui rend heureux, c’est ma seule prétention». Quant à savoir où cet établissement ouvrira, Ivalú le redit: «Nous n’y sommes pas encore, mais dans ma tête je n’ai pas de limites.»

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la