Commentaire de Grégory Beaud
Face à Svoboda, le Lausanne HC a souffert d'un complexe d'infériorité

L'ancienne gloire de NHL voit son rôle diminuer au sein du Lausanne HC dont il est pourtant propriétaire de 20% des actions. Arrivé en 2019, le Tchèque a fait de nombreux dégâts en usant (et abusant) de son aura.
Publié: 04.11.2022 à 13:51 heures
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Dernière mise à jour: 04.11.2022 à 14:29 heures
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Grégory BeaudJournaliste Blick

En tchèque, Svoboda veut dire «liberté». Drôle d'ironie que le Lausanne HC paraisse si libéré avec la mise à l'écart partielle de son actionnaire minoritaire. Car s'il n'a pas tout fait faux depuis qu'il est arrivé tambour battant sur les bords du Léman, force est de constater que Petr Svoboda a de la chance. Celle d'avoir réalisé une carrière admirable. Le C.V. de l'ancienne vedette de NHL et ancien champion olympique parle pour lui. Et c'est d'ailleurs par cette voix qu'il s'exprime le mieux. Pour le reste...

Est-ce que cela garantit pour autant une capacité managériale? Évidemment que non. Mais Gregory Finger, grand argentier de la formation vaudoise, a été séduit. Et lors de son intronisation comme nouveau propriétaire du club, Patrick De Preux, président du LHC, avait longuement insisté sur la «suissitude» de celui qui possède également les passeports américain et russe. Et si, finalement, cette décision de s'acoquiner avec Petr Svoboda était la preuve ultime que le riche homme d'affaires était suisse?

Je m'explique. Depuis qu'elle s'est initiée au hockey, la Suisse a longtemps eu besoin d'aides extérieures pour, déjà, comprendre ce sport. Petit à petit, les dirigeants et les fans helvétiques se le sont appropriés jusqu'à en faire un sport roi du pays. Mais dans un coin de nos têtes, un sentiment demeure tenace: le Russe, le Tchèque, le Canadien ou le Suédois saura toujours mieux que «le bon vieux Suisse». Alors autant faire davantage confiance aux compétences externes qu'aux siennes, si bonnes soient-elles.

Petr Svoboda est arrivé tambour battant.
Photo: freshfocus

«Il est grillé en Amérique du Nord»

Et donc, lorsqu'une vieille gloire n'ayant jamais occupé de position managériale se pointe, il a le bénéfice du doute durant de (trop) nombreuses années. Trois en l'occurrence avant que les premières questions ne se posent sérieusement. La première personne qui m'a parlé de Petr Svoboda - et je m'en souviens comme si c'était hier, car il me le rabâche depuis bientôt trois ans maintenant - l'a fait en ces termes: «Il est totalement grillé en Amérique du Nord. Tu dois te méfier. S'il te dit noir, c'est blanc. S'il te dit blanc, c'est noir. C'est le meilleur moyen de comprendre comment il fonctionne.»

Trois ans après son arrivée et au moment où son blanc-seing paraît (enfin) s'estomper, ces mots résonnent drôlement juste. Oui, Petr Svoboda a usé (et abusé) de son aura pour arriver à une place pour laquelle il n'est absolument pas qualifié. Mais cet épisode en dit, finalement, beaucoup sur le rapport de la Suisse aux «compétences» externes et, in fine, sur son manque de confiance en elle.

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