Cela fait quelque temps que je prévois de m’arrêter sur le niveau de l’arbitrage dans l’élite suisse. D’un côté, ce que l’ASF aime mettre en avant: Sandro Schärer officie en Ligue des champions et Esther Staubli, en plus de la Super League masculine, siffle au sommet du football féminin.
De l’autre, une réalité cruelle depuis l’instauration de la VAR: il faut chaque week-end dix arbitres de qualité à des postes à haute pression, cinq au centre du terrain et cinq autres en cabine, et nous ne les avons pas.
Les mots ont un sens
C’est de ça que j’aurais voulu parler aujourd’hui. Du trou générationnel chez nos arbitres, de leur difficulté à apprivoiser un outil qui semble leur brûler les yeux et les oreilles, de cette règle de la main qui, en Suisse mais aussi ailleurs, pourrit leur travail et notre plaisir. Mais ça, c’était avant qu’on questionne non pas leurs compétences, mais leur probité.
Je parle bien sûr des accusations portées par le FC Sion et son président. Les mots ont un sens. La gravité de termes comme «manipuler», «trafiquer» ou «manigances» devrait tous, suiveurs et acteurs du football suisse, nous mettre en alerte maximale. À l’exception près qu’ils émanent de Christian Constantin, et qu’on est habitués. En guise de preuves, une «intervention extérieure» est évoquée, ainsi que «des rapports universitaires» indiquant que le FC Sion, «plus que tout autre», était défavorisé. Par honnêteté intellectuelle, examinons-les.
La lettre de Sion est digne du Prix Champignac
Premier point: le fait que Luca Cibelli, samedi dernier, ait changé sa décision à la suite d’une «intervention extérieure» qui a choisi les images à lui proposer. En d’autres termes, la définition même de ce qu’est la VAR. L’intervention extérieure a un nom: Sascha Kever, arbitre tessinois retraité des terrains et coupable d’un excès de zèle qui ne fait pas de lui un malhonnête pour autant. Quant à la mesure proposée par le club valaisan, à savoir de placer dans la salle de la VAR «des personnes neutres, représentant les clubs», elle est digne du Prix Champignac.
Deuxième point: les «rapports universitaires». Puisqu’ils ne sont pas référencés dans la lettre du club, je suppose qu’il est fait référence à l’étude que le «Nouvelliste» avait mis en lumière il y a quelques mois: «Rot-Jaune-Verde. Language and Favoritism: Evidence from Swiss Soccer», de Faltings, Krumer et Lechner. Je l’ai lue. Elle est intéressante, et met en avant un biais linguistique qu’il ne faut pas ignorer. En revanche, à aucun moment, elle ne parle de manipulation. Quant au FC Sion, il n’y est pas cité une seule fois.
Le seul but: mettre la pression
Au final, personne n’est dupe. Cette démonstration de force a pour unique but de faire pression sur le corps arbitral pour la fin du championnat. Faire valoir ses intérêts lorsqu’on a été victime de grossières erreurs lors des deux dernières journées est compréhensible, procéder en ces termes est grave, et se rapproche dangereusement de la fameuse «intervention extérieure» que le FC Sion dénonce.
Je serais curieux de voir quelle aurait été sa réaction si Servette, son adversaire de samedi, avait publié une telle lettre quelques jours avant. Et je souhaite bonne chance aux arbitres de ce derby du Rhône, qui se retrouvent dans une situation impossible.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
|---|---|---|---|---|---|
1 |  FC Lugano | 6 | 4 | 13 | |
2 |  Servette FC | 6 | -3 | 12 | |
3 |  FC Zurich | 5 | 6 | 11 | |
4 |  FC Lucerne | 6 | 4 | 11 | |
5 |  FC Bâle | 6 | 9 | 10 | |
6 |  FC St-Gall | 5 | 5 | 10 | |
7 |  FC Sion | 6 | 4 | 10 | |
8 |  Yverdon Sport FC | 6 | -4 | 5 | |
9 |  Grasshopper Club Zurich | 6 | -4 | 4 | |
10 |  FC Lausanne-Sport | 6 | -7 | 4 | |
11 |  FC Winterthour | 6 | -7 | 4 | |
12 |  Young Boys | 6 | -7 | 3 |