«Je faisais semblant d'être déçu»
Malgré l'interdiction, ce fan du FC Bâle était dans le stade à Nice

Un arrêté du ministère de l’Intérieur français interdisait aux supporters du FC Bâle de se rendre à Nice. Quatre amis jurassiens ont bravé la censure et ont pu vivre de leurs propres yeux la qualification rhénane pour les demi-finales de Conference League. Interview.
Publié: 21.04.2023 à 07:30 heures
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Dernière mise à jour: 21.04.2023 à 09:42 heures
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Matthias DavetJournaliste Blick

Comme de nombreux autres, Christian* est un Jurassien fan du FC Bâle. Ce supporter dans la vingtaine est amoureux du club rhénan «depuis la naissance» et, entre autres, grâce aux exploits sur la scène européenne. Il y a dix ans, il vibrait devant sa télé lorsque Bâle s’est qualifié face à Tottenham pour les demi-finales d’Europa League.

Mais désormais, il est assez grand pour vivre en compagnie de ses amis et au stade le parcours européen de son club de cœur. Alors, quand le tirage au sort des quarts de finale de Conference League a eu lieu, il s’est dit qu’un déplacement à Nice ne devait pas être déplaisant. Le jour même, l’avion pour la Côte d’Azur était réservé.

Sauf que le matin du match retour, la nouvelle tombe: aucun supporter du FC Bâle ne pourra prendre place dans les tribunes de l’Allianz Riviera. Le groupe de quatre Jurassiens décide de braver l’interdit et de prendre des billets dans les gradins réservés aux supporters niçois. Contacté par Blick une fois dans son hôtel, Christian nous raconte cette soirée plus que particulière. Interview.

À la fin du match, les joueurs bâlois ont salué et posé devant le secteur visiteur, vide.
Photo: Daniela Frutiger/Freshfocus
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Il y a deux jours, ça ne sentait pas très bon pour les supporters bâlois qui voulaient se rendre à Nice. Vous avez pensé à annuler votre voyage à un moment?
Non. On voyait plutôt ça comme des vacances dans le Sud de la France, à Nice. Si on n’arrivait pas à aller au match, tant pis. Et au fond de nous, il y avait toujours ce petit espoir que le parcage soit ouvert. On s’est dit qu’au pire, on essayerait de trouver des billets sur place et c’est ce qui est arrivé.

On imagine que vous avez vécu une journée particulière…
Ça faisait une heure qu’on était arrivé à Nice. On se baladait sur la promenade des Anglais et c’est à ce moment qu’on a appris que l’interdiction était officielle. On était évidemment déçus.

Rejoindre les supporters rhénans à San Remo, c’était une éventualité pour vous?
Quand on a vu qu’ils se donnaient rendez-vous à San Remo, on s’est regardé dans les yeux et on s’est dit que c’était un peu loin. C’était 45 minutes de taxi ou deux heures de train et ça n’en valait pas la peine. Si on n’avait pas eu de places, on aurait regardé le match dans un bar ou à l’hôtel.

Du coup, vous avez fait quoi?
Je me suis dit qu’il fallait quand même qu’on regarde sur les sites de revente. On ne trouvait pas vraiment et je suis allé regarder sur Viagogo. Il y avait 4 billets à 18 euros l’unité. On s’est dit que c’était sûrement une arnaque mais bon, pour le prix… On a tenté et ça a marché.

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Vous n’avez donc pas eu de problème pour entrer dans le stade avec ces billets?
Trois billets ont été acceptés, mais un non. La sécurité a dit: «C’est un groupe, c’est sûrement un bug de la machine». Un de nous est donc entré dans le stade sans billet.

Mais la sécurité ne vous a pas inquiété? Elle ne vous a pas demandé quel club vous supportiez?
On a acheté une écharpe du match Nice-Bâle pour ne pas entrer les mains vides et qu’on ne nous pose pas trop de questions. Mais je ne peux pas en dire autant de notre voisin en gradins…

Comment ça?
On s’est assis et le gars à côté de nous a commencé à nous parler. Après cinq minutes de bavardages, il nous a dit: «Ah mais vous, vous êtes pour Bâle hein?» Il a reconnu notre accent et il a compris qu’on n’était pas pour Nice. Mais c’était un mec sympa et ça s’est bien passé.

Vous n’avez même pas essayé d’adopter l’accent du Sud?
(Rires) On aurait pu mais je ne suis pas sûr que ça aurait fonctionné.

Et dans le stade, vous avez croisé d’autres supporters bâlois?
Pas loin de nous, il y avait un Suisse-allemand qui n’en avait rien à cirer des règles. Tout le monde le regardait mal mais il s’en foutait. Et finalement, il ne s’est rien passé.

Mais à aucun moment, vous n’avez eu peur de vous faire repérer?
On a été le plus calme possible. On n’a pas trop célébré nos buts. À la fin du match, on a fait le maximum pour ne pas faire de bruit, pas montrer qu’on était trop content et que ça se passe le mieux possible. Je n’avais pas peur des remarques éventuelles de la part de Niçois. Mais d’être là, ce n’était pas légal et je n’avais pas envie de me faire expulser du stade et d’avoir des problèmes avec la police.

Quand Bâle égalise, vous devez donc vous retenir un maximum?
On se fait quelques checks quand même. On essaie de se canaliser mais c’est difficile, surtout à cause de la tension qu’il y avait dans le stade. C’était compliqué.

Il y a ensuite ce but de la victoire.
J’avais une technique. Je me suis pris la tête dans les mains pour faire semblant d’être déçu mais je célébrais seul, dans mon coin.

Et avec la qualification, comment ne pas exulter?
On s’est préparé durant dix minutes pour la victoire. On s’était aussi dit qu’on partait directement et qu’on n’allait pas rester pour célébrer.

*Prénom d’emprunt

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