Chronique de David Lemos
Akanji, pas qu'un Manuel

Pour son baptême du feu sur Blick, le journaliste de la RTS David Lemos revient sur les deux derniers matches de l'équipe de Suisse. A ses yeux, le défenseur de Manchester City s'est imposé comme un leader. Une aura qui dépasse les limites d'un terrain de football.
Publié: 30.09.2022 à 12:01 heures
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Dernière mise à jour: 30.09.2022 à 20:19 heures

L’équipe de Suisse a réussi son dernier test avant d’embarquer pour la Coupe du Monde. Deux victoires, la première de son histoire en Espagne, puis la première en 28 matches face à la République tchèque. L’une de ses bêtes noires, même si beaucoup ont habilement effacé de leur mémoire le match d’ouverture de l’Euro 2008.

Après ce check-up complet, le bilan médical est formel: la colonne vertébrale de l’équipe nationale est en parfait état. S’il jouait dans un club plus coté, les parades de Yann Sommer ces derniers jours auraient fait le tour des réseaux. Après Ramos, Mbappé et Jorginho, avant peut-être Neymar fin novembre, le «penalty killer» a fait échec à Soucek.

Xhaka et Embolo, les patrons

Granit Xhaka, le jeune trentenaire qui (sauf blessure) finira sa carrière au-delà des 150 sélections, reçoit enfin des fans d’Arsenal les louanges que continuent d’appeler au pays ses prestations métronomiques sous le maillot national.

Le parcours et la personnalité de Manuel Akanji sont impressionnants.
Photo: TOTO MARTI

Breel Embolo est de loin le meilleur buteur sous Yakin et à 25 ans l’attaquant suisse numéro 1. Un destin qui lui était promis à 17 ans déjà, lorsqu’il enfilait avec Bâle trois buts à Winterthour en Coupe de Suisse. Une défense dans laquelle débutait… Manuel Akanji.

Une nouvelle référence à City?

C’est de lui que j’aimerais parler plus longuement. Contrairement aux trois cités plus haut, il n’était pas sur le terrain à Saint-Gall et cela s’est vu. Impressionnant de puissance maîtrisée, de calme balle au pied, de leadership silencieux, Manuel Akanji a tout simplement plané au-dessus du match de Saragosse, d’où il a inscrit un but et offert une passe décisive. À Saint-Gall, sans lui, Nico Elvedi a souffert. Associés, les deux hommes n’ont encore jamais perdu avec le sélectionneur actuel.

Adolescent, il était parfois reproché à Manuel Akanji d’être trop «locker», trop détendu, pour devenir un joueur de haut niveau. Au début du mois, on l’a vu afficher sa «lockerheit» à Séville en Ligue des Champions, au cœur de la défense de Manchester City, quatre jours après la naissance de son deuxième enfant. Alors qu’il n’avait qu’un jour et demi d’entraînement avec Pep Guardiola. Depuis, deux autres titularisations ont suivi. Ce temps d’adaptation express et les états de santé d’Aymeric Laporte et John Stones autorisent à penser qu’il y en aura bien d’autres.

Plus rapide qu'une calculette

Il faut admirer la sérénité dont a su faire preuve l’ancien joueur du Borussia Dortmund. Fin août, après avoir refusé de prolonger son contrat au-delà de 2023, il semblait destiné à rester cet automne dans un club qui l’avait déjà remplacé. À 27 ans, Akanji s’était rendu disponible pour un nouveau défi. Les pistes menant vers Manchester United et l’Inter n’ont pas abouti.

Lui qui a la bosse des maths se retrouvait face à un problème de probabilités: trouver en dernière minute un club d’un grand championnat ayant besoin d’un défenseur central et disposé à payer le montant demandé par Dortmund. Quatre semaines plus tard, leur patience a donné raison tant à Manuel Akanji qu’à Manchester City.

Ce coup d’accélérateur à la carrière du défenseur n’est pas anodin. Même si Manuel Akanji était déjà un international confirmé, devenir joueur de l’un des clubs les plus riches au monde, de ceux qui veulent gagner toutes les compétitions auxquelles ils participent, fait changer de dimension (et augmenter sa note dans FIFA). L’ancien joueur du FC Bâle possède les qualités et la confiance en lui qui devraient faciliter cette transition. L’équipe de Suisse en sera l’une des bénéficiaires.

Un modèle cible d'attaques

Je termine sur une note personnelle: je trouverais beau de voir Manuel Akanji devenir une figure sportive de notre pays. L’homme, né d’un père nigérian et d’une mère suissesse, rayonne par son aura et son parcours, marqué par la phrase «prove them wrong « («montre-leur qu’ils ont tort»), a de quoi inspirer.

Tout comme celui de ses deux sœurs qui enrichissent la vie culturelle et politique du canton de Zurich. Michelle codirige un théâtre, Sarah a été élue brillamment au Grand conseil en 2019. L’histoire ne serait pas complète sans mentionner ceci: la politicienne, après avoir été victime d’attaques racistes et sexistes en ligne, ne se représentera pas.

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