Fanny Zürcher: «On m’a souvent comparée à Darius Rochebin»
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Fanny Zürcher:«On m’a souvent comparée à Darius Rochebin»

Fanny Zürcher
«Je me suis créé un avatar pour me protéger»

A l'antenne du «19:30» depuis à peine deux ans, Fanny Zürcher a réussi à mettre les Romands dans sa poche. Rencontre avec la présentatrice d'origine biennoise, qui nous raconte les hauts mais aussi les bas du métier.
Publié: 28.12.2021 à 17:59 heures
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Valentina San MartinJournaliste Blick

Une mine réjouie et une poignée de minutes de retard. Lorsque Fanny Zürcher arrive à la rédaction, on a presque l'impression que c'est une bonne copine d'école qu'on n'a pas croisée depuis des années. Chez Blick, on est persuadés que la jeune femme a fait le même effet aux téléspectateurs du journal de midi en 2019 sur le plateau de la RTS. En l'espace de deux ans, Fanny Zürcher est devenue la chouchoute des Romands. La brune, tout aussi pétillante que piquante, n'était toutefois pas du tout destinée à faire du journalisme.

Un parcours tranquille

Née à Bienne le 23 février 1990, Fanny se prend tout d'abord de passion pour la nature et les animaux. «Je vivais à côté d'une forêt et on partait souvent à la chasse aux salamandres ou aux traces de sangliers», se souvient-elle avec un brin de nostalgie dans la voix. Plutôt studieuse, elle suit un parcours scolaire classique et sans accroc.

Adolescente, Fanny ne passe pas par une période rebelle et ne fait pas la misère à ses parents. Mais la jeune femme avoue avoir été longtemps complexée: «J'ai porté un appareil dentaire pendant trois ans et c'était assez difficile à vivre. C'est peut-être pour ça que je souris beaucoup aujourd'hui, à défaut d'avoir pu le faire quand j'étais ado.»

La Biennoise Fanny Zurcher est l'un des visages de l'actualité sur la RTS.
Photo: RTS/Anne Kearney

Comme son intérêt pour la nature ne semble pas s'être dissipé avec les années, Fanny choisit d'étudier la géographie en plus du français et de l'espagnol à l'Université de Neuchâtel. Après un peu moins d'une année d'échange à Valence et un Master en Lettres en poche, la jeune Fanny s'envole pour Londres où elle enseigne le français dans une école «assez posh», comme elle aime à le décrire.

«Pour moi, le métier d'enseignant a toujours été le plus beau du monde. J'avais presque l'impression d'être prédestinée à faire ça.» Oui, sauf que gérer une classe d'étudiants de 18 ans en uniforme, alors qu'elle n'en a que 23, la met mal à l'aise. C'est là, après une année dans la capitale britannique, que lui vient son premier sursaut rebelle. Fanny quitte tout et retourne en Suisse pour devenir... journaliste, un métier dont elle ignore tout.

Fanny Zürcher et son avatar

Elle postule d'abord chez «Léman Bleu» et décroche un stage de trois mois. «J'étais tellement heureuse qu'on me donne ma chance, surtout que je n'avais aucune expérience et que je connaissais très mal Genève», nous confie la Biennoise, avant d'ajouter y être allée au culot puisqu'elle a «un peu menti» durant son entretien en prétendant adorer la cité de Calvin. Après ces débuts formateurs où on lui apprend à tenir une caméra et créer un sujet de A à Z qu'il faut présenter le jour même au TJ, Fanny enchaîne avec un autre stage à «TeleBielingue», dans sa région natale.

Au printemps 2015, elle tombe sur l'annonce de rêve: un stage à la RTS. Elle postule mais n'y croit pas trop: «Pour moi, c'était impossible d'entrer dans ce grand navire, je voyais ça comme une sorte de rêve inaccessible. Au fond, j'ai toujours voulu être journaliste, mais je n'osais pas me projeter là-dedans par peur de ne pas réussir.» A sa grande surprise, elle est acceptée et aiguise peu à peu ses connaissances. Elle est même envoyée à Zurich en tant que correspondante. Son dada? La télé. Elle passe bien à l'écran et apparaît dans quelques duplex, jusqu'à ce qu'on lui propose de faire des tests pour présenter le journal. Comme quoi, l'audace peut parfois payer.

Photo: RTS/Anne KEARNEY

Après ses premières apparitions à la télé, ses collègues la félicitent et l'encouragent. Quant à ses proches, ils sont plutôt fiers, même s'ils peinent parfois à réaliser que c'est bien leur Fanny à eux qui leur livre les nouvelles du jour. «Au début, ma mère avait de la peine à me reconnaître. Elle disait que je parlais comme une Genevoise et que ma tenue et ma coiffure n'allaient pas du tout», s'amuse-t-elle.

Pour faire la part des choses et se protéger, la jeune femme se dédouble: «Il y a la Fanny de tous les jours et l'avatar: la Fanny de l'antenne, celle qu'on peut critiquer ou même traîner dans la boue.» Car oui, lorsqu'on devient une personnalité publique, on finit par être à la merci du jugement des autres, qu'on le veuille ou non. Ça fait partie du package. «C'est d'autant plus difficile quand on est une femme. Soit on évite les questions qui fâchent et on est traitée de cruche, soit on est dans l'offensive et on est catégorisée comme 'agressive'.»

Au cœur d'une polémique

Les questions qui fâchent, justement, Fanny n'a pas peur de les poser. Et puis, il y a eu LA question qui a fait scandale, celle dont tout le monde – de la presse aux politiques – a parlé. «Vous avez une histoire de vie plutôt traditionnelle, vous avez été mère au foyer pendant dix-neuf ans. Est-ce que vous avez vraiment le bon profil pour faire avancer la cause des femmes à Berne?», demandait-elle à la conseillère aux États valaisanne Marianne Maret lors d'une interview au 19:30 au mois de juin dernier.

Photo: DR/RTS

Là, à 30 ans à peine, Fanny Zürcher doit faire face à une volée de critiques. On qualifie son intervention de mauvais goût, voire sexiste. «J'ai très mal vécu cette polémique. Ce qui a été très difficile, c'est l'idée d'avoir blessé des gens à travers cette question et, surtout, d'être passée pour quelqu'un que je ne suis pas.»

Alors, la jeune Biennoise regrette-elle sa question? C'est un peu plus complexe que cela: «Je ne regrette pas la question en elle-même, mais plutôt sa formulation, qui était peut-être un peu maladroite, j'en conviens.»

Loin de l'avoir dissuadée de faire son job, ce «shitstorm», comme elle l'appelle, l'a poussée à «oser aller au front» même si cela implique de nouveaux potentiels remous: «Je ne me suis jamais censurée. Je trouve inquiétant qu'on peine désormais à accepter que je ne fais que mon travail. Cette question ne reflétait pas mon opinion.» Pour Fanny, être journaliste, c'est devenir la voix de la population: «Et en tant que porte-parole, je me devais de poser cette question qui, je pense, était légitime.»

Retour aux sources

Même si devenir une personnalité publique n'est pas toujours simple, cela vient aussi avec son lot de petits rien qui font du bien. On la reconnaît dans le train, on la complimente sur sa page Instagram ou Facebook et on lui demande même parfois quelques selfies. Fanny Zürcher est avant tout une femme simple qui aime le contact humain.

Malgré tout, la jeune femme ne tient pas forcément à être ultra médiatisée: «Je souhaite préserver mon intimité.» Pour preuve, lorsqu'on aborde le sujet des amours, Fanny la joue plutôt discrète et préfère garder certaines choses pour elle.

Après Valence, Londres, Genève et Zurich, la journaliste a récemment pris la décision de retourner dans son canton d'origine, un retour aux sources qui lui fait le plus grand bien. «Là-bas, les gens ne me reconnaissent pas, ils me connaissent. Avec eux, je n'ai pas à faire semblant. Je peux laisser mon avatar de côté, je suis plus libre.» La présentatrice serait-elle donc une fille comme les autres dans cette région qui l'a vue grandir? Pas tout à fait. «Mon père qui était prof a longtemps été une figure assez emblématique dans le quartier. On m'appelait 'la fille de Philippe'. Aujourd'hui, ça s'est inversé. On appelle mon père: 'le papa de Fanny Zürcher'!»

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