Une nouvelle étude le montre
Sortir du nucléaire en Suisse permettrait de produire davantage d'électricité

Sans la sortie du nucléaire et le développement des énergies renouvelables, la Suisse ne serait pas mieux lotie au niveau énergétique qu'aujourd'hui, avance une nouvelle étude. Nous produirions même moins d'électricité. L'autrice des recherches explique pourquoi.
Publié: 06.03.2023 à 06:02 heures
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Dernière mise à jour: 06.03.2023 à 06:48 heures
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Danny Schlumpf

La guerre en Ukraine a souligné la vulnérabilité des systèmes d’approvisionnement en énergie. Y compris en Suisse. Les partisans du nucléaire veulent désormais lever l’interdiction de construction de nouvelles centrales, assurant que sans cette énergie, la sécurité de l’approvisionnement serait menacée en Suisse. L’UDC ne se garde pas non plus d’affirmer que «la transition énergétique a échoué».

Ce constat est loin de faire l’unanimité. Léonore Hälg, de la Fondation suisse de l’énergie (SES) contredit le parti conservateur: «C’est le contraire qui est vrai. Seule la promotion des énergies renouvelables garantit la sécurité de l’approvisionnement. Les centrales nucléaires la réduisent.» La représentante de la SES note que la Suisse n’a pas fait progresser davantage la transition énergétique ces dernières années.

Une transition forcée produirait le plus d’énergie

Léonore Hälg a d’ailleurs signé une récente étude qui le prouve: l’énergie solaire aurait pu fournir près de cinq térawattheures d’électricité supplémentaires dès 2021 avec les moyens financiers nécessaires. En 2025, il en aurait même résulté neuf térawattheures supplémentaires.

Léonore Hälg, de la Fondation suisse de l'énergie, a mené une étude qui compare l'impact de différents scénarios sur l'approvisionnement en électricité de la Suisse. Dans tous les cas de figure, la transition énergétique et la sortie du nucléaire produiraient plus d'électricité.

En revanche, si la Suisse avait renoncé à la transition énergétique et freiné le développement de l’énergie solaire, elle disposerait aujourd’hui de deux térawattheures et demi d’électricité en moins. En 2025, il s'agirait de cinq térawattheures.

Dans son étude, la responsable du département énergies renouvelables et climat de la SES a examiné quatre autres scénarios en plus de la production effective selon la stratégie énergétique 2050. Elle a calculé la quantité d’électricité que la Suisse aurait produite en 2021 et 2025.

Dans le premier scénario, la transition énergétique et la sortie du nucléaire n’ont pas eu lieu. Dans le deuxième scénario, il n’y a pas non plus de sortie du nucléaire et la transition énergétique est limitée. Dans les troisième et quatrième scénarios, l’étude table sur un tournant forcé: une fois avec un arrêt rapide des centrales nucléaires – dans le cadre duquel la centrale de Beznau aurait été déconnectée du réseau en 2017 – et une fois avec une sortie progressive du nucléaire, qui laisserait Beznau encore en activité en 2025.

Résultat: un tournant énergétique forcé avec une sortie progressive du nucléaire aurait conduit à la production d’électricité la plus élevée en 2021 (69,1 térawattheures). La production réelle était alors de 64,2 térawattheures. C’est 7% de moins.

La sortie du nucléaire apporterait plus d’électricité

Le tableau est similaire pour l’année 2025: la poursuite inchangée de la transition énergétique permettrait la production de 68,7 térawattheures. Sans changement de cap et sans sortie du nucléaire, ce chiffre serait de 63,8. Le tournant énergétique forcé avec une sortie rapide du nucléaire produirait en revanche 72,5 térawattheures, et même 77,6 dans le cas d’une fin progressive du nucléaire. Les deux variantes entraîneraient une augmentation de la production annuelle de plus de neuf térawattheures – plus que la production annuelle de la centrale nucléaire de Gösgen.

Cela est d’autant plus remarquable qu’en 2025, une coupure de l'approvisionnement depuis l’Union européenne (UE) est possible: la Suisse n’a pas d’accord avec cette dernière, raison pour laquelle les importations d’électricité ne seront plus garanties en hiver à partir de cette date.

«L’étude montre que la transition énergétique n’a pas échoué», pointe Jürg Rohrer, maître de conférences en énergies renouvelables à la Haute école des sciences appliquées de Zurich. Ce dernier n’a pas participé à l’enquête, mais constate «que nous serions nettement plus avancés si nous avions poursuivi la transition de manière plus exploratoire».

L’étude montre qu’une sortie rapide du nucléaire réduit la production d’électricité. «Malgré tout, il serait important de fixer une date d’arrêt, propose Jürg Rohrer. Cela aurait pour conséquence un caractère contraignant qui accélérerait le développement des énergies renouvelables.»

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