Un UDC vaudois irrité par des tifosi
Il propose de mettre fin aux klaxons avec son arme, la police le met en joue

Après la victoire de l'Italie contre la Turquie, Günter Hanisch, membre du comité central de l'UDC Vaud, a appelé la police pour se plaindre du bruit causé par des supporters. L'homme s'est permis «une boutade» qui lui a valu de se faire confisquer toutes ses armes.
Publié: 08.07.2021 à 15:29 heures
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Dernière mise à jour: 08.07.2021 à 17:30 heures
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Günter Hanisch est un franc-tireur. Ce Lausannois, membre du comité central de l’UDC Vaud, par ailleurs délégué national du parti bourgeois, n’est pas du genre à prendre des pincettes pour ménager son interlocuteur. Son tempérament bouillonnant et son goût pour les armes lui ont récemment causé des ennuis dans sa ville, a appris Blick.

Une drôle d’affaire, un soir d’Euro, qui a valu au sexagénaire une descente de police à domicile et la saisie de son arsenal. Une dizaine de pièces allant d’un pistolet Sig-Sauer P220 jusqu’à un mousqueton, en passant par un fusil à pompe Winchester 1300 Defender. Mais Günter Hanisch, qui dénonce «des violences policières», refuse d’en rester là.

Les armes saisies chez Günter Hanisch par la police. (Image d'illustration)
Photo: Pierre Ballenegger
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Rembobinons. Dans un courriel adressé ce mardi à Pierre-Antoine Hildbrand, le municipal de la Sécurité publique, le militant UDC raconte sa mésaventure survenue le 11 juin dernier, vers 23h15. Les tifosi fêtent leur victoire face à la Turquie et exultent. Mais les klaxons, bruits de moteurs et cris irritent Günter Hanisch, qui a des problèmes de santé.

Günter Hanisch, membre du comité central de l'UDC Vaud, estime que sa santé s'est dégradée à la suite de l'intervention de police à son domicile.
Photo: D.R.

Blague douteuse ou menace?

Alors qu’il a pris des somnifères, le tapage le réveille. Il a l’esprit «vaseux». L’UDC appelle le 117 pour se plaindre et pour demander aux agents de ramener l’ordre dans sa rue. Toutefois, Günter Hanisch a la désagréable impression de ne pas être pris au sérieux par la personne au bout du fil. Elle lui répond sur un «ton moqueur et irrespectueux», estime-t-il. La discussion «devient désagréable». Le retraité suggère alors à la police de débarquer, dans un ballet de feux bleus, pour mettre fin aux bruyantes festivités. Il propose en outre de venir soutenir les agents. Si besoin, «à l’aide de son arme d’ordonnance».

Une intimidation inquiétante ou une regrettable blague de mauvais goût? «C’était une boutade et nullement une menace contre l’ordre et la loi, je l’ai dit au standardiste», précise à Blick le principal intéressé. La police ne l’a visiblement pas cru sur parole. Environ une heure plus tard, quelqu’un sonne avec insistance à la porte de Günter Hanisch. Ce dernier regarde par le judas mais ne voit personne. Il ouvre tout de même et… se retrouve nez à canon avec des agents.

«Ils étaient en position et me tenaient en joue avec leur arme de poing, assure l’officier retraité de l’armée suisse. Ils m’ont plaqué contre le mur et m’ont fouillé. Ils m’ont aussi palpé les parties intimes à travers mon pyjama», s’étrangle celui qui ne comprend pas pourquoi il a été traité «comme un criminel» et pourquoi les forces de l’ordre ont pénétré chez lui «sans son autorisation».

Santé «détériorée» par la police

Après avoir été contraint à s’asseoir dans son salon, Günter Hanisch affirme avoir pleinement coopéré. «Je suis cardiaque et un vieil homme, pas un fou furieux, tonne-t-il. Le chef d’intervention s’en est bien rendu compte puisqu’il s’est excusé en disant qu’il ne faisait que son métier. L’intervention était hallucinante, complètement disproportionnée.» Le sexagénaire respire un grand coup. «Ils m’ont saisi toutes mes armes, c’est du vol! J’ai écrit aux autorités pour les récupérer mais je n’ai obtenu aucune réponse. J’ai été victime de violences policières, mon état de santé s’est détérioré depuis et ils en portent la responsabilité. Cela doit cesser.»

Kevin Grangier, président de l'UDC Vaud, n'a «aucun commentaire à faire» sur l'affaire qui touche celui qui siège au sein du comité central de l'UDC Vaud.
Photo: Keystone

Kevin Grangier, président de l’UDC Vaud, était en copie du courriel adressé à Pierre-Antoine Hildbrand. Il martèle à Blick qu’il n’a aucun commentaire à faire sur le fond de cette affaire. «Cet épisode privé ne concerne pas l’UDC Vaud», insiste-t-il. Il reprend: «En tant que parti politique, nous sommes souvent sollicités par des privés qui veulent obtenir un maximum d’audience pour des affaires privées et qui pensent que nous pouvons être leur défenseur. Mais un parti n’est pas un cabinet d’avocats ou un centre de médiation.»

«L’intervention s’est déroulée dans le calme»

Nous avons confronté la police municipale lausannoise au récit de Günter Hanisch. Sans se prononcer précisément sur ce cas, elle confirme qu’une intervention a eu lieu le 11 juin dans le contexte des célébrations d’après-match. Des armes ont effectivement été saisies à cette occasion. «Un rapport a été transmis à l’autorité compétente», écrit dans un courriel Sébastien Jost, porte-parole.

La police municipale de Lausanne refuse de dire si les armes récupérées ce soir-là étaient en règle.
Photo: Keystone

Les forces de l’ordre refusent de dire si les armes récupérées ce soir-là étaient en règle. Concernant les accusations de «violences policières», le porte-parole livre une version des faits quelque peu différente: «L’intervention s’est déroulée dans le calme, soutient-il. Nous rappelons que toute personne qui n’est pas satisfaite d’une intervention de police peut s’adresser au préposé à la déontologie de la police de Lausanne qui traite, notamment, les doléances concernant la qualité de l’accueil ou de la réponse, l’usage de la contrainte et la légitimité d’une intervention ou la manière de la gérer.»

Sébastien Jost rappelle en outre, toujours «sans évoquer un cas précis», que «la loi indique que les armes trouvées en possession de personnes dont il y a lieu de craindre qu’elles les utilisent de manière dangereuse doivent être saisies.» Il poursuit: «La procédure veut que, lors de la saisie préventive d’une arme à feu, celle-ci soit transmise au Bureau des armes de la Police cantonale. Pour récupérer l’arme, il faut adresser une demande à cette instance qui statue.»

Günter Hanisch compte justement contacter le préposé à la déontologie de la police de Lausanne dans les prochains jours. «Ce qu'il s'est passé est intolérable, lâche-t-il. Je vais aller au bout de la démarche. J'ai toujours été un ami de la police mais ce sentiment est en train de basculer. Et je veux récupérer mes armes.»

Deux listes UDC rivales

Günter Hanisch avait déjà fait les gros titres en 2017. Pour des raisons politiques cette fois. Il voulait se présenter avec un colistier à l’élection au Grand Conseil dans le district de Lausanne sous l’appellation UDC, en tant que membres de sa section historique. Une procédure menée alors que leur liste avait été désavouée par l’UDC cantonale lors d’une assemblée générale, sur fond de tensions personnelles.

Les députés vaudois avaient dû se pencher sur cette histoire d’appellation. Après un recours contre la décision du bureau électoral lausannois qui sommait les deux UDC dissidents de changer le nom de leur liste pour laisser la place à celle validée par le parti, Günter Hanisch et son colistier avaient finalement été sèchement recalés par le Grand Conseil.

Günter Hanisch avait déjà fait les gros titres en 2017. Pour des raisons politiques cette fois. Il voulait se présenter avec un colistier à l’élection au Grand Conseil dans le district de Lausanne sous l’appellation UDC, en tant que membres de sa section historique. Une procédure menée alors que leur liste avait été désavouée par l’UDC cantonale lors d’une assemblée générale, sur fond de tensions personnelles.

Les députés vaudois avaient dû se pencher sur cette histoire d’appellation. Après un recours contre la décision du bureau électoral lausannois qui sommait les deux UDC dissidents de changer le nom de leur liste pour laisser la place à celle validée par le parti, Günter Hanisch et son colistier avaient finalement été sèchement recalés par le Grand Conseil.

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