Question de position politique
Au contraire de l'EPFL, l'UNIL accepte-t-elle le boycott d'Israël?

L'EPFL dit s'opposer «à toute action de boycott académique». Et à l'Université de Lausanne, une chercheuse refuse de travailler avec les institutions israéliennes «jusqu'à la fin du génocide à Gaza». La notion de boycott académique questionne sur le campus lausannois.
Publié: 01.03.2024 à 06:05 heures
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Dernière mise à jour: 01.03.2024 à 06:51 heures
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Léo MichoudJournaliste Blick

L'Université de Lausanne (UNIL) permet-elle le boycott académique des institutions israéliennes? La question se pose, après la prise de position de sa chercheuse en psychologie sociale Oriane Sarrasin dans une interview accordée à Blick. La scientifique, également députée socialiste au Grand Conseil vaudois, estime que «refuser de travailler avec une institution financée par une entité nationale en guerre, ce n’est pas discriminatoire. On peut dire que c'est du boycott, éventuellement.»

Elle indique avoir fait le choix de refuser la collaboration avec des institutions israéliennes, après avoir «informé diverses instances de l'UNIL»: «J’ai averti mon université, en précisant les mots que j’allais utiliser dans ma réponse.» Pour l'employeur, cette décision a été «prise de manière privée», et «n’engage pas l’institution», nous a indiqué la porte-parole Géraldine Falbriard, par courriel. Mais alors, peut-on considérer que l'UNIL, en se distançant de la décision d'Oriane Sarrasin sans la désapprouver, autorise le boycott?

La question se pose dans d'autres écoles

Sur le même campus vaudois, l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) a récemment été amenée à se prononcer sur cette notion de boycott à la sauce universitaire. Le 21 février, Blick écrivait un article au sujet de l'EPFL, accusée par l'association Unipoly de contribuer au «génocide en cours» à Gaza. On y apprend que l'école s'oppose «à toute action de boycott académique» puisque «la science est, par essence, internationale».

A l'Université de Lausanne comme dans d'autres écoles romandes, étudiants et employés posent la question de la relation institutionnelle avec Israël.
Photo: Keystone

À Genève, la Haute école d'art et de design (HEAD) a également été interpellée par une action d'étudiants demandant le boycott, indiquait le 19 février un article du «Courrier». Dans le «19h30» du lundi 26 février à la RTS, on apprenait que la HEAD a refusé de cesser ses collaborations avec des institutions israéliennes, mais promet d'ouvrir le dialogue.

Au niveau institutionnel, l'UNIL est en relation avec deux lieux de formation israéliens, nous apprend la chargée de presse. Depuis 2019 et jusqu'en 2024, l'université travaille avec l'Ashkelon Academic College, pour un accord «de recherche» avec la faculté de théologie, permettant «la mobilité des enseignants». Et depuis 2022 jusqu'en 2027, une collaboration est en cours avec l’Université hébraïque de Jérusalem, pour les Sciences sociales et politiques (SSP), ainsi que pour autoriser la mobilité des étudiants entre cette institution et Lausanne.

Faire comme l'EPFL?

L'UNIL ne se calque donc pas exactement sur son voisin faiseur d'ingénieurs. Raison avancée du côté de la chercheuse, comme de celui de son employeur: la liberté académique. En gros, le droit pour un scientifique, même en emploi dans une université, de s'engager à titre personnel pour des causes et des valeurs.

Géraldine Falbriard détaille ce cas précis: «L’UNIL n’a pas à prendre de mesures restrictives aussi longtemps que les conditions d’une liberté académique sont respectées.» Ainsi, tant qu'il n'y a pas de liens «avec une institution qui prendrait officiellement une position incompatible avec cette liberté», c'est tout bon.

Pas de positionnement politique

D'autant plus que l'UNIL se distancie de tout avis politique au niveau institutionnel: «Les missions premières de l’UNIL sont l’enseignement et la recherche, clarifie la porte-parole. Il ne nous appartient pas, en tant qu’institution publique, de prendre position sur des sujets politiques, sauf si ces sujets ont un lien direct avec nos missions.» Exemple de ces sujets politiques ayant des conséquences directes sur les actions de l'Université de Lausanne? Les relations Suisse-Europe et leur impact sur la recherche, spécifie Géraldine Falbriard.

Un seul cas de figure autoriserait l'UNIL à cesser sa collaboration avec les universités d'un pays en particulier. Selon la porte-parole, il faudrait que «la Confédération décide de l’interruption de toute relation avec les institutions d’un État en guerre... ou autre.» Pour le reste, celle qui estime que «le boycott académique n'est pas un concept» et renvoie à l'interview accordée à nos confrères de la RTS dans «Forum», par Luciana Vaccaro, présidente de la faîtière des universités Swissuniversities.

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