Légal, mais bizarre
Pierre Maudet, élu ministre, siège quand même comme député à Genève

Lors de la première séance du Grand Conseil de Genève après les élections cantonales, Pierre Maudet, pourtant élu ministre, a été repéré en train de siéger parmi les parlementaires. Sa présence en tant que député est bien légale et permise, mais interroge d'autres élus.
Publié: 11.05.2023 à 19:26 heures
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Dernière mise à jour: 11.05.2023 à 20:36 heures
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

Pierre Maudet a été élu ministre, plus précisément à la tête du Département de la Santé et des Mobilités à Genève, à l'issue des élections du 30 avril 2023. Pourtant, ce jeudi, alors que le nouveau Grand Conseil se réunit pour la première fois, il a été repéré dans le parterre, parmi les députés.

Il s'agit d'une démarche tout à fait en règle, puisque le futur ministre n'a pas encore prêté serment pour le Conseil d'État. Et a été élu en tête de liste au Grand Conseil lors du premier tour (à l'image de tous les autres conseillers d'Etat). Il est donc simple député jusqu'au 31 mai prochain.

Sauf qu'aucun autre magistrat élu le 30 avril dernier n'a procédé comme «le revenant», leurs sièges étant quant à eux déjà occupés par les «vient-ensuite» de l'élection au Grand Conseil, comme le prévoit le système.

Que fait la tête de proue du mouvement Liberté et justice sociale (LJS) aux côtés de ses neufs députés? Anecdote: il a même été désigné à la Commission de Grâce par tirage au sort.

Que fait le ministre nouvellement élu parmi les parlementaires? (Photo d'archives)
Photo: keystone-sda.ch

Jamais été député

Interrogé par message quant aux raisons de sa présence, il nous répond qu'il souhaite entre autres «coacher» ses nouveaux députés (beaucoup étant novices en politique).

Pierre Maudet écrit par message: «Nonobstant le coaching nécessaire des nouveaux élus en politique, n’ayant moi-même jamais été député précédemment, il me semblait intéressant de profiter de cette période de latence (ndlr: avant sa prestation de serment comme ministre) pour me rendre compte, de l’intérieur, du travail à engager, et pour créer des liens avec les groupes.»

D'autres grincent des dents

Qu'en pensent celles et ceux qui, eux, resteront bien au parlement, une fois que le Conseil d'État aura tourné, dans quelques jours? L'initiative du nouveau ministre de la Santé et des Mobilités ne fait pas forcément l'unanimité.

Depuis la cafétéria du parlement, le député-suppléant UDC Patrick Lussy commente: «C'est bien légal, en effet. Après, si c'est bien ou pas, c'est une autre question. En tout cas, pour un futur ministre, c'est dommage qu'il arrive en chemise!»

Contacté par message pendant la séance, le socialiste Diego Esteban se montre un peu plus véhément: «Pour un Conseiller d'Etat élu, dont le dicastère est déjà attribué, rester député pose pour moi problème, au niveau la séparation des pouvoirs.»

Il s'inquiète de l'accès que Pierre Maudet – débouté du gouvernement en 2018, puis revenu aujourd'hui – pourrait ainsi avoir à certains «documents liés à la surveillance parlementaire».

La faute au calendrier

Son collègue de parti Cyril Mizrahi, député et désormais candidat au Conseil national, n'en pense pas moins: «C'est le seul conseiller d’Etat élu à continuer à siéger comme député, notamment au sein de la commission de contrôle de gestion... Je ne comprends pas ce choix, pour le moins incongru du point de vue de la séparation des pouvoirs, comme s’il fallait être partout et tout contrôler. Est-ce que Monsieur Maudet ne ferait pas confiance à son propre groupe?»

Un autre socialiste, Alberto Velasco, n'est quant à lui pas choqué: «Il l'a dit: il n'a jamais été député auparavant! Je pense qu'il voulait simplement voir ce que c'est, d'être député, le temps de quelques jours.»

Du côté du PLR, le député Pierre Nicollier hausse les épaules: «Ce n’est pas Pierre Maudet qui est étrange, c’est le calendrier qui décale d’un mois la prise de fonction des députés et du Conseil d’Etat!»

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