Le PS se déchire sur le ticket féminin
Des femmes socialistes soutiennent Daniel Jositsch

La décision de la direction du PS de présenter un ticket 100% féminin à la succession de Simonetta Sommaruga fait des remous. Daniel Jositsch, qui pourrait s'annoncer candidat mardi, l'estime «discriminatoire». Et le Zurichois peut compter sur des soutiens féminins.
Publié: 07.11.2022 à 10:48 heures
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Dernière mise à jour: 07.11.2022 à 10:54 heures
Sermîn Faki

«J'ai le plaisir de vous inviter à une conférence de presse portant sur la succession de Madame la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga.» C'est ainsi que Daniel Jositsch convoque les médias, ce lundi, pour le lendemain à 13h. Selon toute vraisemblance, le Zurichois devrait annoncer officiellement qu'il brigue le poste socialiste vacant au gouvernement. Le sénateur avait déjà expliqué qu'il trouvait «discriminatoire» le choix de la tête de son parti.

Voilà qui pourrait être un sacré caillou dans la chaussure de la direction du PS. Car le parti a annoncé, sitôt la démission de Simonetta Sommaruga officialisée, que le ticket socialiste serait composé de deux femmes. Impossible d'imaginer, pour une formation qui milite en faveur de l'égalité, d'être représentée par un duo masculin. «Même temporairement», en anticipant la démission prochaine d'Alain Berset, a averti la tête du parti.

«En tant que féministe, cela me dérange»

Cette position n'est pas partagée par tout le monde, au sein du PS. Fait piquant, deux femmes au moins s'opposent à ce parti pris: les conseillères nationales Franziska Roth (Soleure) et Gabriela Suter (Argovie). «Je trouve qu'officialiser cela est maladroit, tant sur le plan démocratique que stratégique», déclare la première à la «SonntagsZeitung».

Daniel Jositsch va-t-il annoncer sa candidature mardi après-midi?
Photo: Keystone

Cela ne veut pas forcément dire que Franziska Roth souhaite voir un homme être élu. La Soleuroise estime néanmoins que le parti peut compter sur des femmes suffisamment compétentes pour faire leurs preuves même si elles sont mises en compétition avec les hommes. «En tant que féministe, cela me dérange d'être réduite à mon genre.»

Cet appel à la compétition interne n'est pas partagé par la direction du PS. Peu importe, au final: c'est le groupe parlementaire qui aura le dernier mot. «Je ne peux m'imaginer que l'on s'écarte de ce mot d'ordre», coupe Cédric Wermuth auprès de Blick. Il y a toujours eu un homme et une femme à siéger pour le PS, relève le coprésident du parti à la rose. Une autre stratégie ne serait pas comprise par la population.

Pour Franziska Roth, le choix de la direction du PS va précisément à l'encontre de sa conception de l'égalité.
Photo: Keystone

Alain Berset, pierre angulaire

Gabriela Suter n'est pas du même avis que son coprésident et camarade de canton. Aux yeux de l'Argovienne, le parti peut tout a fait être représenté par deux hommes ou deux femmes pendant une période transitoire. Le problème? Rien n'indique qu'Alain Berset va forcément se retirer prochainement. Mattea Meyer, qui codirige le PS avec Cédric Wermuth, part du principe que le Fribourgeois restera «encore quelques années» au gouvernement.

Le signe que Daniel Jositsch met autant d'énergie dans cette candidature montre que c'est peut-être sa dernière chance. Après le refus poli des deux conseillères d'État vaudoises Nuria Gorrite et Rebecca Ruiz, il est presque acquis que le siège sera occupé par quelqu'un provenant de Suisse alémanique. Et cela ne fait pas le jeu du conseiller aux États zurichois: si le poste est occupé par une femme venant d'outre-Sarine, alors la succession d'Alain Berset devrait être assurée par un Romand.

«Rien ne changera»

Est-ce que le ticket 100% féminin est une décision définitive? Rien n'est moins sûr. Des membres de premier plan du parti, comme les conseillères nationales Barbara Gysi (Saint-Gall) et Edith Graf-Litscher (Thurgovie), estiment que la question doit encore être débattue. Le conseiller aux États sortant Hans Stöckli a une position plutôt ironique: «Daniel Jositsch a le droit de mener ce débat, mais rien ne changera.»

Le Bernois soutient la direction de son parti, qui a eu raison selon lui de restreindre «immédiatement et fermement» la course à un duel féminin. Le délai entre la démission de Simonetta Sommaruga et l'élection prévue le 7 décembre est court et ne laisse pas de place pour l'improvisation, explique Hans Stöckli. Et le PS peut compter sur «de nombreuses candidates de qualité».

Hans Stöckli tacle Daniel Jositsch: «C'est son droit de mener ce débat, mais rien ne va changer.»
Photo: Keystone
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