La conseillere d'Etat Nuria Gorrite parle lors de la conference de presse sur une nouvelle strategie de promotion du velo dans le canton de Vaud ce mardi 2 novembre 2021 a Lausanne. (KEYSTONE/Laurent Gillieron)
Photo: keystone-sda.ch

Troisième voie CFF
Nuria Gorrite joue-t-elle les girouettes?

Mercredi soir sur le plateau de la RTS, Nuria Gorrite a plaidé pour de nouvelles infrastructures ferroviaires entre Lausanne et Genève alors qu'elle tenait le discours inverse il y a quelques années. La conseillère d'État vaudoise s'en explique.
Publié: 11.11.2021 à 14:35 heures
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Dernière mise à jour: 11.11.2021 à 17:24 heures
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Adrien SchnarrenbergerJournaliste Blick

«Un bel exercice d'enfumage». C'est avec ces mots que le consultant Stéphane Koch s'en prend à Nuria Gorrite sur Twitter. La «faute» de la conseillère d'État vaudoise? Être venue sur le plateau du «19h30» pour défendre de nouvelles infrastructures ferroviaires sur l'Arc lémanique alors qu'elle-même n'en voulait pas en 2012, déjà sur la RTS.

Commençons par la plus récente des interventions. La ministre socialiste a été invitée mercredi soir par la télévision romande pour réagir à l'affaire du «trou» qui paralyse les bords du Léman depuis deux jours, depuis qu'une entreprise privée a effectué des travaux ayant attaqué le ballast et ainsi paralysé le trafic ferroviaire.

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Face au présentateur Philippe Revaz, la conseillère d'État vaudoise a été offensive. «Ailleurs dans le pays, surtout en Suisse alémanique, il y a toujours une redondance, c'est-à-dire une alternative», a-t-elle estimé. La paralysie actuelle est donc «la preuve par le chaos» qu'il n'y a pas de solution à part l'interruption du trafic, sur une ligne qui transporte «20'000 passagers par heure». Pour Nuria Gorrite, il est «grand temps» de planifier une fameuse ligne en souterrain, vraisemblablement à l'horizon 2050».

«Qui a perdu du temps?»

Le journaliste de la RTS a tiqué sur cette phrase. «Pourquoi me parlez-vous de 2050?», a interrogé Philippe Revaz, prompt à la contre-offensive. «Gouverner c'est prévoir, Nuria Gorrite. Qui a perdu du temps?» Prise au dépourvu, la socialiste a invoqué la responsabilité de la Confédération, qui aurait privilégié d'autres secteurs dont la région du Gothard ou celle de Zurich, poumon économique du pays. Or, l'arc lémanique n'est pas en reste: de 25’000 pendulaires par jour en 2000, il y en a 60’000 aujourd’hui et bientôt 100'000 en 2030, selon la RTS.

Le hic, c'est que la présidente du Conseil d'État, en poste depuis 2012, n'a pas toujours tenu ce discours. Cette année-là, la ministre fraîchement élue est apparue dans un reportage en train d'expliquer aux pendulaires les grands projets ferroviaires autour du Léman.

Le sujet de ce qui était alors le «téléjournal» de la RTS a un retentissement particulier, neuf ans après. «Davantage de trains et de places assises, mais surtout une troisième voie entre Renens et Allaman qui n'est plus d'actualité», explique la journaliste. Ce à quoi une certaine Nuria Gorrite est invitée à réagir. «Les gens sont restés sur l'idée de cette 3e voie. C'est aussi quelque chose qu'on avait envisagé, mais aujourd'hui nous allons intervenir autrement, plutôt sur le matériel roulant et les infrastructures de transport.» (voir ci-dessous à partir de 2'15'').

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Alors, Nuria Gorrite a-t-elle pratiqué le retournement de veste? Interrogée, la conseillère d'État est bien loin de se décomposer. La question est même un peu naïve, à l'entendre. «En politique, toute la stratégie est de tenir un discours en fonction du moment. Il faut adapter son discours à la bonne temporalité», explique la socialiste.

La ministre n'était d'ailleurs pas la seule à plaider contre une «simple» 3e voie entre Allaman et Renens à l'époque: le PLR Olivier Français estimait qu'il fallait voir «plus loin qu'une solution qui fasse le va-et-vient entre Lausanne et Genève».

«Obtenir la suite!»

Il faut dire qu'en 2012, l'actualité était le «FAIF», le financement et aménagement de l'infrastructure ferroviaire. «Vaud et Genève étions aux premières lignes pour obtenir le financement de Léman 2030. C'était la priorité à l'époque: obtenir ces trois milliards que nous avons déployés depuis», se souvient Nuria Gorrite. Cette manne a notamment permis de moderniser les gares de Lausanne et de Renens, les points de croisements à Mies et Chambésy, le saute-mouton... «Si l'on avait évoqué un horizon 2040, on n'aurait jamais pu avoir des fonds si vite», assure la conseillère d'État.

En 2021, quel est le «moment»? «Obtenir la suite!», sourit Nuria Gorrite. Les besoins sont nombreux, puisque le réseau est surchargé durant les moments de pointe et d'hyperpointe. «Nous discutons d'une stratégie 2035. Il y a notamment un tunnel à double voie entre Morges et Allaman, qui doit nous permettre d'assurer un début de redondance.» Comprenez: la fameuse solution de rechange qui fait tant défaut ces jours.

Face à Bâle et Lucerne

Mais la ministre voit plus loin, et même «horriblement loin»: 2050. La Confédération vient de présenter sa vision à cet horizon, avec un objectif de doubler la part modale du rail. «Dans ce contexte, il est primordial que Berne se penche sur des solutions pour l'Arc lémanique, qui est une forme d'entonnoir au bout duquel se trouve Genève.»

Or, la Confédération n’a pas encore présenté ses plans financiers. Nuria Gorrite lorgne ce gâteau dont elle espère éviter que les grosses parts soient attribuées à la Suisse alémanique, comme souvent par le passé. La concurrence est rude puisque les gros projets ne manquent pas: le Herzstück (métro urbain) de Bâle ou la nouvelle gare de Lucerne, pour ne citer que ceux-ci.

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