21 chars au coeur d'un scandale
Un cadre valaisan du groupe d'armement Ruag visé par une enquête allemande

Tempête dans l'industrie de l'armement suisse! Un cadre du groupe Ruag est visé par une enquête allemande. Motif: le valaisan serait mêlé à la vente douteuse de chars Leopard 1, stockés en Italie.
Publié: 27.08.2023 à 15:12 heures
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Raphael Rauch

Le groupe d'armement Ruag, propriété de la Confédération, a tout fait pour garder secrètes les enquêtes menées contre un ex-collaborateur. Cinq suspects sont en effet dans le viseur de la justice allemande, dont cet ancien manager.

Des procureurs anti-corruption allemands enquêtent sur de possibles détournements de fonds, des faits de gestion déloyale, de corruption et de trafic d'influence dans des relations commerciales liées à la vente de chars Leopard 1 stockés en Italie.

Un contrat douteux aurait été conclu par le biais d'une entreprise dans laquelle l'épouse de l'ancien manager détenait une participation de 50%.

Les autorités allemandes enquêtent sur cinq personnes – dont un ancien cadre de Ruag – liées à la vente douteuse de chars Leopard 1.
Photo: Keystone
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«Tous ces faits sont explicables, mais je suis muselé par mon avocat» a fait savoir l'ancien responsable valaisan dans une note que Blick a pu consulter.

L'enquête est en cours depuis un an et demi. On ne sait pas si et quand des poursuites seront engagées. L'avocate actuelle du couple s'est murée dans un silence prudent, protégée par la présomption d'innocence de son client.

Une cellule de crise a été formée par Ruag

Selon les informations de Blick, une perquisition a eu lieu le 1er mars 2022 au sein de Ruag, faisant suite à une vente «suspecte» de pièces de chars le 12 novembre 2019. On ne sait toutefois pas si elles proviennent des chars que Ruag a achetés en Italie.

Selon des éléments du dossier, ces pièces – des engrenages de chars – ont été vendues «avec une augmentation de prix flagrante», notamment à l'entreprise de l'épouse du responsable visé par l'enquête. Ruag a depuis pris ses distances avec lui.

Une cellule de crise a été mise en place chez Ruag. Une note du groupe d'armement critique des processus de vente et d'achat «insuffisamment documentés». La note évoque par ailleurs des erreurs de stock, les engrenages de chars n'ayant en effet pas été comptabilisés correctement.

La tarification des pièces d'armement n'est pas non plus «compréhensible», car il manque «des données sur le marché et les prix pratiqués à l'époque». Des informations qui auraient peut-être été volontairement cachées.

Enfin, on a appris ce lundi que 25 chars Leopard 1 – au cœur d'un imbroglio diplomatique entre la Suisse, l'Ukraine et des pays de l'OTAN – n'appartiendraient peut-être même pas à Ruag, mais à l'entreprise allemande Global Logistics Support. Depuis des années, cette entreprise se positionne en effet comme un intermédiaire entre l'armée allemande et Ruag.

L'Allemagne aurait réclamé les chars

Selon une note interne, GLS a commandé à Ruag ces 25 chars Leopard 1, le 27 novembre 2019. Mais il s'agissait d'un contrat en tous points bancal, précise cette note.

On ne sait pas pourquoi GLS n'a pas récupéré les chars en Italie depuis 2019 – même si depuis, la guerre en Ukraine, lancée au printemps 2022, y est probablement pour quelque chose. Le 28 mars 2022, Ruag a toutefois confirmé l'accord passé avec GLS, qui a réclamé les 25 engins ce vendredi par communiqué de presse.

L'entreprise allemande aurait acquis la «propriété illimitée» des 25 véhicules et souhaiterait à présent les récupérer en Italie.

Le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco), responsable des exportations d'armement, n'a pourtant reçu aucune demande de Ruag concernant les 25 chars pour GLS.

Un casse-tête pour le ministre de l'Economie Guy Parmelin et la cheffe du Département fédéral de la défense (DDPS) Viola Amherd, qui a entre-temps annoncé l'ouverture une enquête externe sur la vente de ces 25 chars.

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