Martin Vetterli
«Je suis chercheur par passion»

Martin Vetterli, président de l’EPFL, explique ce qui l’a amené à la recherche et pourquoi il écrit cette chronique.
Publié: 10.06.2021 à 14:02 heures
Martin Vetterli

J’ai toujours été curieux, ce qui m’a amené à vouloir comprendre comment les choses fonctionnent. Enfant, je passais des heures à démonter des radios et à construire des fusées avec mon frère, ce qui du reste nous a valu de passer à la télévision! Devenu adolescent, ce sont des synthétiseurs que je bricolais. J’aimais l’école pour apprendre de nouvelles choses et j’adorais lire, Jules Verne et ses récits d’expéditions incroyables ou Conan Doyle et son Sherlock Holmes.

De la philosophie à l’ingénierie

Au gymnase, mon professeur de philosophie a suggéré que je fasse des études universitaires de mathématiques et de philosophie, ce que j’aurais adoré. Mon père, plus pragmatique, m’a recommandé de plutôt me tourner vers le métier d’ingénieur! Il avait probablement raison: un ingénieur moyen gagne certainement mieux sa vie qu’un philosophe moyen.

C’est surtout les mathématiques et la physique que j’ai aimées pendant mes études à l’École polytechnique fédérale de Zürich. Cependant, c’est mon amour de la musique et de la photographie qui m’a orienté vers le traitement du signal et des images, une branche de l’ingénierie et des mathématiques appliquées que j’étudie encore aujourd’hui.

J’ai découvert la recherche lorsque j’ai effectué mon Master à l’université de Stanford en Californie. J’ai eu la chance de travailler avec Bernie Widrow, un professeur qui a co-inventé l’un des premiers algorithmes de ce que nous appelons aujourd’hui le «machine learning» (l’apprentissage automatique).

La serendipité comme boussole

De retour en Suisse, j’ai rédigé ma thèse sous la conduite du professeur Henri Nussbaumer. Il m’a laissé beaucoup de liberté et c’est là que j’appris une notion essentielle à la recherche: la serendipité. Ce concept me guide aujourd’hui encore pour approcher les problèmes de recherche.

Après ma thèse à l’EPFL, j’ai eu l’envie irrésistible de retourner aux États-Unis, le centre du monde des technologies de l’information et le pays des possibilités illimitées pour un jeune chercheur. C’est comme ça qu’à 30 ans à peine j’ai eu mon premier poste de professeur. J’avais une liberté incroyable ce qui impliquait aussi beaucoup de responsabilités. Mes expériences académiques aux États-Unis m’ont beaucoup influencé et me servent encore dans mes fonctions actuelles.

La vérité et la beauté

Même si j’ai peu à peu basculé dans le versant plus administratif de la recherche, je garde toujours un pied dans la science, c’est très important pour moi. La raison est simple: une bonne recherche, c’est comme un voyage vers l’inconnu et c’est aussi passionnant que dans Jules Verne. De plus, il y a des parallèles entre la recherche et l’art étant donné que les deux font appel à la créativité et visent la vérité et la beauté, deux valeurs fondamentales de notre civilisation.

J’ai une seconde passion, celle de parler et d’écrire à propos de science et de technologie. N’est-ce pas dans la nature du professeur d’expliquer les choses? Je partage cette passion avec deux autres professeurs, mes collègues Michael Hengartner, président du Conseil des EPF et Joël Mesot, président de l’EPF de Zürich. Nous sommes tous les trois ravis d’alterner désormais régulièrement pour nous mettre au clavier et raconter dans cette chronique les questionnements du monde scientifique et les sujets qui nous interpellent.

Nous espérons réussir à faire passer notre enthousiasme pour la recherche et nous vous souhaitons une bonne lecture!

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