Joël Mesot, président de l'EPFZ
Petit guide du dialogue scientifique

Chaque deux semaines, à travers sa chronique, un chercheur nous emmène dans les coulisses de la recherche suisse. Joël Mesot, le président de l’EPFZ, propose de repenser la façon dont la science dialogue avec le public, sur fond de scepticisme lié au vaccin.
Publié: 25.08.2021 à 07:47 heures
Joël Mesot

Grâce à la science et à la technique, nous vivons plus longtemps, en meilleure santé et plus confortablement que les générations précédentes. Cependant, dans les États démocratiques, le progrès technique est lié au consensus social. Il est difficile d'imaginer qu'une technologie puisse survivre en Suisse si elle n'est pas acceptée et approuvée par la majorité. Le consensus est obtenu par le débat et le dialogue. La Suisse, avec sa culture politique de négociation constante des positions, maîtrise parfaitement l’art du dialogue. Néanmoins, la pandémie semble nous avoir mis des bâtons dans les roues. La communauté scientifique, en particulier, a tout intérêt à ce que nous retrouvions une véritable culture du dialogue.

Trois conditions doivent être remplies pour qu'un véritable dialogue puisse être instauré entre la science et la société:

  1. Premièrement, le dialogue est une rencontre à hauteur d'yeux. Il ne s'agit pas seulement de présenter son propre point de vue, mais aussi d'écouter l'autre. La communication à sens unique, dans le sens de «maintenant je vais t'expliquer comment le monde fonctionne» n'est pas compatible avec notre tradition de participation à la discussion.
  2. Deuxièmement, le dialogue exige un respect mutuel: respect de l'autre personne, de son opinion, mais aussi de l'expertise des scientifiques.
  3. Troisièmement, un véritable dialogue se fonde sur des faits. C'est probablement l'une des plus grandes réussites de notre civilisation que la science ait développé au fil des siècles des procédures et des méthodes qui conduisent à de nouvelles connaissances et les rendent vérifiables. Certaines de ces découvertes sont devenues des certitudes, d'autres font encore l'objet de débats scientifiques. La science doit présenter de manière transparente ce qui est avéré et ce qui est encore incertain. En retour, le partenaire de dialogue doit également accepter que tout n'est pas négociable – la terre est ronde, qu'on le veuille ou non.

Mais quels objectifs poursuivons-nous avec le dialogue? Il faut au minimum respecter les règles du jeu décrites afin d'instaurer la confiance. Pour moi, un autre objectif est atteint lorsque les deux parties apprennent l'une de l'autre dans le dialogue. Le simple fait d’éliminer les préjugés et de clarifier les malentendus constitue un pas dans la bonne direction. Troisièmement, il est légitime de vouloir convaincre l'autre de ses propres arguments. Je suis conscient que les arguments scientifiques ne prévalent pas toujours. Après tout, nous nous définissons aussi par des valeurs, ce qui peut conduire à un conflit d'objectifs. Si cette conscience fait défaut, le dialogue risque d'échouer.

Photo: Editing Lab

Nous devrions pratiquer le dialogue comme un programme de fitness, encore et encore. La prochaine occasion se présentera les 4 et 5 septembre dans le cadre des journées scientifiques «Scientifica» organisées par l'université et l'ETH Zurich. Profitez de l'occasion pour venir découvrir Zurich. Sous la devise «Naturel - Artificiel», nos chercheurs donneront un aperçu de leurs travaux. Ils se réjouissent surtout de pouvoir discuter avec vous sur les différents sites des deux hautes écoles. En raison du Covid, les participants de 16 ans et plus doivent présenter un certificat Covid valide. Pour que le dialogue puisse se dérouler dans le respect mutuel. https://scientifica.ch/

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