Rencontre avec Loukachenko
Vladimir Poutine cherche-t-il à stocker des armes nucléaires en Biélorussie?

Vladimir Poutine a annoncé vouloir livrer des lance-missiles Iskander à capacité nucléaire à la Biélorussie. Le président russe multiplie également les rencontres avec ses homologues des pays voisins. Est-il en train d'essayer de changer la dynamique de la guerre?
Publié: 28.06.2022 à 06:03 heures
|
Dernière mise à jour: 28.06.2022 à 06:20 heures
Fabienne Kinzelmann

L'annonce est explosive: la Russie veut transférer des lance-missiles terrestres de type Iskander en Biélorussie – sur lesquels peuvent être installés des ogives nucléaires. C’est ce qu’a promis Vladimir Poutine au dictateur biélorusse Alexandre Loukachenko lors d’une rencontre samedi à Saint-Pétersbourg.

Les Iskander-M peuvent «accueillir aussi bien des missiles balistiques que des missiles de croisière, qu’ils soient conventionnels ou nucléaires», s’est vanté le président. Selon les médias russes, ils ont une portée allant jusqu’à 500 kilomètres.

D'après les indications du chef du Kremlin, les avions de combat de type Su-25 de la Biélorussie devraient être modernisés. «Cette modernisation devrait être effectuée dans des usines aéronautiques en Russie» afin que ces avions puissent également transporter des armes nucléaires.

Vladimir Poutine et Alexandre Loukachenko lors de leur rencontre à Saint-Pétersbourg.
Photo: IMAGO/SNA
1/2

Dimanche, la Russie a tiré des missiles sur Kiev pour la première fois depuis trois semaines. Et ce depuis la Biélorussie. Le principal allié de la Russie en Europe est-il en train de se doter d'armes nucléaires?

Rapprocher les armes nucléaires des pays de l'UE

Il s'agirait d'une nouvelle étape dans l'escalade conflictuelle opposant l'OTAN à la Russie. Comme l’Ukraine, la Biélorussie a renoncé aux armes nucléaires à la fin de la guerre froide après l’effondrement de l’Union soviétique.

De son côté, l'OTAN a garanti qu'elle ne déploierait pas d'armes nucléaires dans les nouveaux Etats membres d’Europe centrale et orientale. Si Vladimir Poutine arme la Biélorussie, cet accord deviendrait caduc.

Cependant, il n’est pas certain que la Biélorussie puisse encore stocker des missiles nucléaires de manière adéquate. L’expert en armes nucléaires de l’ONU, Pavel Podvig, estime que la probabilité d’un stationnement des armes nucléaires en Biélorussie est «proche de zéro», comme il l’écrit sur Twitter.

Un autre scénario envisageable est que Vladimir Poutine décide de déplacer les armes nucléaires près de la frontière biélorusse. Cette possibilité constitue à elle seule un message non dissimulé à l’Europe, où se déroule une série de sommets – avec, au centre de l’attention, l'Ukraine. Après le sommet du Conseil de l’UE, au cours duquel le pays agressé par la Russie a été désigné candidat à l’adhésion, le sommet du G7 a débuté ce week-end en Allemagne. Suivront ensuite le sommet de l’OTAN à Madrid, dès ce mardi, et la conférence sur la reconstruction de l’Ukraine à Lugano.

Renforcer les relations avec les pays voisins de la Russie

Face au large front international, Vladimir Poutine veut manifestement changer la dynamique de la guerre. Deux autres décisions du président russe vont dans ce sens. Il a renvoyé le dernier général en date responsable de l’Ukraine, Alexander Dvornikov, après moins de deux mois.

Le chef du Kremlin renforce non seulement ses relations avec la Biélorussie, mais également avec d’autres pays voisins. Il se rend au Tadjikistan ce mardi pour son premier voyage à l'étranger depuis le début de la guerre en Ukraine. Tandis que, ce mercredi, il prévoit de participer à un sommet d’Asie centrale au Turkménistan.

Zelensky appelle les Biélorusses à ne pas «se laisser entraîner dans la guerre russe»

Cependant, les ex-républiques soviétiques ne sont pas toutes acquises à la cause russe. Le Kazakhstan, par exemple, a refusé de reconnaître les républiques populaires autoproclamées de Lougansk et de Donetsk, soutenues par la Russie, situées dans l'est de l'Ukraine. En outre, une allocution vidéo de Volodymyr Zelensky pourrait également faire réfléchir les voisins de Vladimir Poutine.

Après les attaques de missiles et la promesse de Vladimir Poutine à Alexandre Loukachenko, le président ukrainien a appelé dimanche soir les Biélorusses à ne pas se laisser entraîner dans la guerre d’agression russe. Il a affirmé que, pour le chef du Kremlin, ils n'étaient que des «esclaves et de la chair à canon».

(Adaptation par Quentin Durig)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la