Les objectifs du nouveau roi
Un proche de la famille royale analyse le futur règne de Charles

L'expert en royauté Alexander von Schönburg a pu rencontrer la reine elle-même. Il raconte à Blick comment était la défunte monarque en privé, les obstacles qu'aura à affronter le nouveau roi et ce qu'il pense du refus de venir au couronnement de la duchesse Meghan.
Publié: 06.05.2023 à 11:56 heures
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Dernière mise à jour: 06.05.2023 à 11:57 heures
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Remo Bernet

Dans son dernier ouvrage «Was bleibt, was wird - Die Queen und ihr Erbe» («Ce qui reste, ce qui évolue - La reine et son héritage»), l'expert en royauté Alexander von Schönburg revient sur la vie de la monarque décédée en septembre dernier. La particularité de ce livre? L'Allemand appartient à ce que l'on appelle la noblesse appauvrie, la reine faisait partie de la famille éloignée de sa femme, et il alors pu rencontrer lui-même la famille royale à plusieurs reprises au cours de sa vie.

Peu avant le couronnement du roi Charles III, son expertise est donc particulièrement sollicitée. Le journaliste a d'ailleurs dû régulièrement interrompre l'entretien avec Blick - les articles prévus et une émission en direct sur l'événement centenaire ne lui laissaient pas de répit.

Vous avez pu rencontrer la reine en personne. Quel souvenir en gardez-vous?
La reine était fascinante. Se retrouver face à elle est profondément impressionnant. Une vieille théorie d'un historien dit qu'un roi est deux personnes en une: d'une part un monarque et d'autre part un mortel normal. Dans ce cas-ci, j'ai rencontré la reine en même temps que la grand-tante de ma femme. Elle menait une double existence. Officiellement, elle portait des vêtements faits pour elle et était à ce moment-là la reine, mais en dehors des apparitions publiques, elle portait volontiers une écharpe en soie et passait alors à l'Elizabeth privée.

Alexander von Schönburg a déjà eu l'occasion de rencontrer personnellement la famille royale à plusieurs reprises.
Photo: zVg
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Comment était-elle dans les moments où elle était l'«Elizabeth privée»?
Elle était mystérieuse, mais aussi très drôle. Par mystérieuse, j'entends qu'elle disait beaucoup de choses par ses regards et ses expressions faciales, qu'il fallait alors décrypter et comprendre. Je l'ai trouvée pleine d'humour lorsqu'elle m'a entendu parler allemand et qu'elle a imité mon accent. C'était vraiment drôle.

Vous avez pu dîner avec la reine Elizabeth II. De quoi parle-t-on avec quelqu'un comme elle?
C'est comme si on parlait respectueusement à une tante. On parle de soi et on est réticent à poser des questions. Elle est très à l'écoute et voulait savoir beaucoup de choses sur moi et sur Berlin.

Les relations de la monarchie avec la presse sont considérées comme tendues. Qu'est-ce que les membres de la famille royale ont-ils pensé du fait que vous soyez journaliste?
En fait, tout le monde dans la famille royale voyait mon travail d'un œil critique - sauf la reine. Le prince Philip et ses collaborateurs étaient très méfiants et me faisaient sentir que j'étais une sorte de personne à risque en tant que journaliste. La reine, en revanche, était un être très généreux et comprenait qu'en tant que noble appauvri, je ne pouvais pas rester dans un château et je devais nourrir ma famille d'une manière ou d'une autre. Venant d'elle, j'ai ressenti beaucoup de confiance.

Comment décririez-vous la relation entre la reine Elizabeth II et son fils, le roi Charles III? Dans votre livre, vous parlez d'une enfance marquée par la «froideur émotionnelle».
Charles a perdu sa mère très tôt. D'abord, ses parents se sont enfuis et ont vécu à Malte parce que Philippe y avait un poste dans la marine. Charles et Anne ont grandi sous la garde de leurs nounous. Leur seule référence familiale était la reine mère. En 1953, après le couronnement de la reine Elizabeth II, elle a dû prendre plus de responsabilités et elle n'avait définitivement plus la possibilité d'être la mère que l'on s'imagine dans une famille normale. Charles, petit enfant, aurais une fois pris son courage à deux mains et aurait frappé à la porte du bureau de sa mère pour lui demander si elle avait le temps de jouer avec lui. Elle aurait refermé la porte et répondu: «J'aimerais bien». Son père, le prince Philip, a veillé à ce que Charles aille dans un internat très strict. Charles n'a jamais caché qu'il y était victime de mobbing.

Quelle était la relation entre Charles et sa mère dans les années qui ont précédé sa mort?
J'étais là lorsque Charles a fêté ses 70 ans. J'ai assisté à un discours très affectueux de la reine. Deux choses me sont restées en mémoire. Premièrement, qu'elle a un respect incroyable pour son fils, qui a réinventé le rôle de Prince de Galles. Pendant longtemps, celui-ci a été exercé par des bons à rien qui ne voulaient que s'amuser dans la vie! Mais Charles s'est positionné comme une voix contre le courant dominant. J'ai aussi retenu la joie de la reine de pouvoir assister au 70e anniversaire de son fils.

Votre livre traite de l'héritage qu'Elizabeth II laisse derrière elle. Le roi Charles peut-il être à la hauteur de celui-ci?
C'est la question centrale qui se pose à présent. Mais en ce moment, si près du couronnement, il ne faut pas spéculer à ce sujet, mais lui souhaiter le meilleur. Toutefois, une fois les festivités terminées, on verra s'il parvient à sortir de l'ombre de la reine. Il prend ses fonctions à une époque précaire, où la monarchie est en équilibre instable. Le respect qu'elle inspire a fortement diminué ces derniers temps, notamment chez les jeunes. Lorsque la reine Elizabeth II est montée sur le trône, c'était très différent. Elle était alors extrêmement jeune et il y avait une atmosphère de renouveau après la guerre.

Quel est le plus grand défi pour le nouveau roi?
Il doit faire le grand écart entre la modernisation et la préservation du cœur de la monarchie. Ce faisant, il ne doit pas porter atteinte aux traditions. On voit déjà comment Charles tente de le faire lors du couronnement. On assistera à un faste comme on n'en voit nulle part ailleurs dans le monde et il y aura des éléments qui datent déjà de milliers d'années et qui remontent au premier testament. Malgré tout, Charles a fait l'effort de rendre le tout plus moderne. Par exemple, il ne sera pas accueilli par l'archevêque de Canterbury, mais par un enfant. De même, seul William effectuera encore le geste traditionnel d'hommage.

Autre chantier du nouveau roi: la famille semble brisée. Quelle est l'ampleur des dégâts causés par Harry et Meghan?
La reine a regardé cela avec sérénité, notamment en raison de son âge. Le roi Edward a, lui aussi, rédigé des mémoires en exil, dont plus personne ne parle aujourd'hui. C'est pourquoi, grâce à son expérience, la reine a tout pris avec beaucoup plus de calme que Charles. Elle savait que les querelles familiales sont normales - aussi normales que la réconciliation.

Vous croyez donc à la réconciliation de Harry et Meghan et de la famille royale?
Oui, je compte beaucoup dessus! Mais cela prendra encore quelques années. Un jour, on regardera tout cela avec plus de douceur. Comme on l'a déjà fait pour Diana - qui a elle aussi longtemps été considérée comme une source de troubles. Plus personne ne remet aujourd'hui en question le fait qu'elle a aidé la famille royale à s'accommoder de la modernité et qu'elle a donné un visage humain à la monarchie.

Que pensez-vous de la décision de la duchesse Meghan de ne pas assister au couronnement?
Je trouve que c'est une décision extrêmement sage. Elle aurait attiré l'attention sur elle. C'est une solution de compromis géniale que Harry vienne seul et disparaisse rapidement. S'ils n'étaient pas venus tous les deux, cela aurait été un affront. S'ils étaient arrivés ensemble, la presse se serait littéralement jetée sur eux.

Le livre «Was bleibt, was wird - Die Queen und ihr Erbe» est disponible dans le commerce.

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