L'Afrique n'est pas emballée par l'idée
Giorgia Meloni veut soutenir l'Afrique pour éviter l'immigration

Moins de réfugiés, c'est ce que Giorgia Meloni avait promis à ses électeurs. Elle veut les laisser en Afrique. La première ministre italienne a invité 46 pays à une réunion internationale à Rome et a fait miroiter un accord de 5,5 milliards d'euros.
Publié: 31.01.2024 à 13:05 heures
Blick_Portrait_1329.JPG
Myrte Müller

L'ancienne post-fasciste est soumise à une forte pression sur sa politique intérieure. Lors de son élection, elle a promis de résoudre le problème de l'immigration. Mais depuis son arrivée au pouvoir en septembre 2022, le nombre de réfugiés traversant la Méditerranée a doublé pour atteindre plus de 153'000 personnes. Mais les blocus maritimes et la remigration, jargon habituel de l'ultradroite européenne, ne font plus partie du vocabulaire de Giorgia Meloni.

Elle veut néanmoins tenir sa promesse électorale et se débarrasser d'un grand nombre de réfugiés. Mais de la manière la plus diplomatique possible. C'est pourquoi la cheffe des Fratelli d'Italia mise sur l'Afrique – et sur le rapprochement avec l'UE qui veut également résoudre son problème de réfugiés. Le calcul de Meloni: des programmes de soutien de plusieurs milliards doivent retenir les jeunes dans leur patrie africaine, des alliances économiques ainsi que des partenariats politiques doivent rendre les expulsions vers ces pays tiers plus attractives.

L'Italie veut jeter des ponts entre les continents

Giorgia Meloni appelle son projet le plan Mattei, du nom d'un célèbre président du géant italien de l'énergie, Eni. Elle fait la promotion de projets pilotes dans les domaines de l'énergie, de la santé, de l'alimentation et de l'éducation. Elle propose une enveloppe de 5,5 milliards d'euros pour ce pojet. Giorgia Meloni ne veut pas faire de vagues. Elle veut faire de l'argent.

La Première ministre italienne Giorgia Meloni, en blazer blanc, accueille les chefs d'État de 40 pays africains lors de son sommet africain. Le thème de la conférence: un pont pour une croissance commune.
Photo: Getty Images
1/8

Confiante, la première ministre italienne a organisé le lundi 29 janvier 2024 la «conférence Italie-Afrique» à Rome. «Un sommet d'égal à égal», a souligné Giorgia Meloni. Elle a reçu 40 chefs d'État et ministres africains, des représentants de l'UE, de l'ONU, de l'Union africaine ainsi que des représentants de la finance et de l'économie. Mais pas uniquement en tant que chef du gouvernement italien. En janvier, la Romaine a pris la présidence du G7. Celui-ci se réunira au sommet en juin dans les Pouilles. La présidente du G7 promet que l'Afrique y occupera une «place d'honneur».

Des invités de marque comme la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola et le président du Conseil européen, Charles Michel devraient donner encore plus de poids à l'événement.

Les Africains peu impressionnés

Mais l'attitude des Africains est désabusée. L'accord de Giorgia Meloni n'est pas accueilli avec des louanges, mais plutôt avec méfiance. «Nous n'avons pas été consultés au préalable sur le plan Mattei», critique aussitôt Moussa Faki Mahamat au pupitre. Le président de la Commission de l'Union africaine met en garde: «L'Afrique est prête à discuter, mais les paroles doivent être suivies d'actes.»

Des pays importants de la région du Sahel, précisément là où se trouvent les principales routes de réfugiés, ont annulé leur participation. Ainsi, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont brillé par leur absence. Le pays le plus peuplé d'Afrique, le Nigeria, n'a pas non plus envoyé de représentant. Même si elle est importante, l'Europe n'est pas le nombril du monde pour des pays comme l'Éthiopie, la Libye, l'Algérie, l'Égypte. Il en va pour eux comme pour de nombreux autres pays africains. Entre-temps, la Chine, la Russie, la Turquie et les Émirats donnent le ton.

Une perte de contact avec l'Afrique

«De nombreuses opportunités manquées», écrit «La Repubblica» qui cite l'exemple du Nigeria. Après le coup d'État au Niger voisin, l'Italie aurait pu offrir son soutien. Les Nigérians vont désormais chercher de l'aide auprès de Moscou, de la Turquie et des Émirats.

La Chine a investi des milliards sur le continent pour la Route de la soie et exige également une obéissance politique. La Russie fournit des mercenaires, des hélicoptères et de l'argent sale dans les zones de conflit. Au cours des vingts dernières années, la Turquie a multiplié par 20 le volume de ses échanges commerciaux pour atteindre 61 milliards d'euros. Le président turc, Recep Erdogan, a ouvert 31 ambassades en Afrique. Turkish Airlines survole 61 villes africaines, écrit encore «La Repubblica». Les Émirats ont déjà livré discrètement des drones au général libyen, Chalifa Haftar, qui fricote avec le groupe Wagner, lors du conflit libyen. Les Arabes sont intervenus militairement au Tchad, au Somaliland, en Éthiopie et au Soudan.

Ce que ces investisseurs africains ont en commun ne plaira guère à Giorgia Meloni. Ils ne partagent aucune sympathie avec l'Europe et ne sont pas vraiment intéressés par une solution pour les réfugiés en Italie.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la