La nouvelle arme de Poutine en provenance d'Iran
Les «drones kamikazes» venus d'Iran pourraient être dévastateurs

Les «drones kamikazes» venus tout droit d'Iran coûtent peu et sont primitifs. Pourtant, ces outils utilisés par la Russie sont incroyablement dangereux. Explications.
Publié: 18.10.2022 à 15:38 heures
Fabian Babic

Lundi matin, des explosions ont à nouveau secoué Kiev. L’armée russe s’est attaquée à la capitale. Les autorités ukrainiennes ont aussitôt rapporté que des «drones kamikazes» iraniens avaient été utilisés. Le maire de Kiev avait notamment tweeté à ce sujet.

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Or, ces armes de guerre présentent un danger élevé: elles sont peu coûteuses et ont une grande portée. C’est certainement pour cette raison que le chef du Kremlin mise sur elles. Sur le front, les troupes russes les avaient déjà utilisées auparavant. En tout cas depuis le mois d’août, rapportent les services secrets britanniques: en septembre, des modèles du type Shahed-136 auraient survolé des positions ukrainiennes dans la région nord-est de Kharkiv. Des images ont montré les restes de drones kamikazes. Ils ont été repeints aux couleurs russes et étiquetés «Geran 2».

Les experts militaires craignent que les armes iraniennes ne mettent les Ukrainiens dans l’embarras. Jusqu'ici, la technologie des engins volants russes était plutôt rudimentaire. Mais Scott Crino, ancien lieutenant-colonel de l’armée américaine, a déclaré au «Wall Street Journal» que ces drones iraniens Shahed-136 pourraient changer la donne: ils pourraient constituer un «contrepoids solide» aux systèmes d’armes occidentaux aux mains des Ukrainiens. «L’utilisation des Shahed-136 dans la guerre en Ukraine modifie sans doute aucun les plans opérationnels de Kiev», assène Scott Crino.

Les restes de drones iraniens Shahed-136 sont de plus en plus souvent découverts en Ukraine.
Photo: Verteidigungsministerium der Ukraine
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20’000 dollars américains par drone

Le drone Shahed-136 peut parcourir jusqu’à 2500 kilomètres. Son rayon d’action rend le «drone kamikaze» iranien dangereux, révèle Samuel Bendett, expert de ce type d'appareil au Center for Naval Analysis américain, au magazine allemand «Der Spiegel». L'appareil peut atteindre des cibles dans le domaine tactique, c’est-à-dire par exemple des lanceurs de missiles multiples Himars, qui opèrent dans un rayon de 70 kilomètres près du front.

Depuis peu, des drones plus petits de type Shahed-131 sont également utilisés, comme le montrent les découvertes faites à Kiev. Ils ont une portée d’environ 900 kilomètres. Lors de la nouvelle attaque sur Kiev, environ 40 engins ont été utilisés, selon le ministre de l’Intérieur, Denys Monastyrskyj.

Ce ne serait pas un chiffre étonnant: ces tueurs des airs seraient relativement bon marché. Leur prix d’achat est tenu secret. Mais l’expert militaire Samuel Cranny-Evans pense pouvoir l’estimer à 20’000 dollars pièce, comme il le déclare au journal espagnol «El Pais». A titre de comparaison, le drone de combat turc Bayraktar TB2 vaut quelque 2 millions de dollars.

Les services secrets ukrainiens évaluent le nombre de drones iraniens commandés par le Kremlin à 2400 machines. Le gouvernement de Téhéran affirme en revanche n’avoir livré aucun «drone kamikaze» à la Russie, comme le rapporte l’agence de presse Reuters.

Mais le fait est que les Russes semblent bien en utiliser. La défense antiaérienne ukrainienne est certes puissante, mais il leur serait impossible de neutraliser tous ces drones. «Les Russes n’ont pas à se soucier des chiffres. Ils peuvent se permettre de générer une guerre d’usure en multipliant les attaques», analyse Samuel Bendett auprès du «Spiegel». D’autant plus que la défense aérienne ukrainienne travaille déjà à la limite de ses capacités. Il serait ainsi très problématique de devoir dépenser davantage de ressources et de munitions contre les drones kamikazes.

Les Etats-Unis veulent aider à la chasse aux drones

Toutefois, le bas coût de cet équipement a des conséquences. Ces drones sont rudimentaires: leur caméra et leurs capteurs sont de basse qualité. Contrairement à d’autres modèles, l’exemplaire iranien se contente de voler vers les coordonnées saisies.

Les drones kamikazes sont donc adaptés uniquement aux cibles immobiles. De plus, ils sont considérés comme faciles à abattre pour les systèmes de défense. Selon les services secrets britanniques, ils peuvent être visés sans trop de problèmes pour une défense aérienne conventionnelle tant qu’ils se déplacent à une basse altitude.

Alors, pour faire face aux attaques en essaim des drones, des alliés internationaux veulent apporter leur aide. Peu après l’arrivée des drones Shahed, les États-Unis ont proposé leur système anti-drones Titan. Ce système dispose d’une intelligence artificielle qui repère les ennemis et parvient à proposer une stratégie pour les mettre hors d'état de nuire.

Les Ukrainiens espèrent ainsi pouvoir choisir des moyens de défense plus efficaces et renoncer à des missiles antiaériens coûteux. Le système Vampire, qui vient également des Etats-Unis, semble le plus approprié. Avec un mélange de petits missiles et d’un brouilleur, il devrait bientôt s’envoler pour chasser des drones en Ukraine.

Développement de son propre drone de combat

Mais l’Ukraine elle-même souhaite aussi utiliser des drones pour attaquer les Russes. Selon Defense News, les Etats-Unis livreront bientôt à l’Ukraine des missiles Switchblade-600. Ces engins perfectionnés sont nettement supérieurs aux modèles iraniens en termes de précision. Leur livraison serait attendue dans les prochains jours.

Mais ce n’est pas tout: après les attaques dévastatrices menées lundi matin par des drones kamikazes iraniens, la société d’armement ukrainienne Ukroboronprom a fait savoir que la construction de son propre drone de combat serait «sur le point d’être achevée». La portée de cet appareil serait d'«environ 100 kilomètres» et le poids de l’ogive serait de 75 kilogrammes. Aucun autre détail n’a pour l’instant été communiqué.

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