«C'est simplement de la survie»
Quelle est la situation des 2,9 millions d'Ukrainiens qui ont fui en Russie?

La guerre en Ukraine a privé de nombreux Ukrainiens de leur maison. Ils se sont réfugiés en Europe, en Suisse… mais aussi en Russie. Ceux qui s'y enregistrent légalement n'ont toutefois pratiquement aucune chance de revenir en Ukraine un jour.
Publié: 26.02.2023 à 16:14 heures
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Dernière mise à jour: 26.02.2023 à 16:25 heures
Jenny Wagner

Près de 2,9 millions de personnes ont fui l’Ukraine pour se rendre en Russie, selon l’Operational Data Portal (ODP). Certains d’entre eux ont été déportés, d’autres sont partis volontairement dans le pays qui a déclenché une guerre dans leur terre d’origine. Le président russe Vladimir Poutine a promis 10’000 roubles (123 francs) à tous les Ukrainiens qui s’installaient volontairement en Russie, ainsi que leur protection.

Le début de la guerre, le 24 février 2022, a déchiré de nombreuses familles. Les Ukrainiens qui vivaient en Russie se sont sentis coupables, mais ceux qui osaient manifester étaient arrêtés. «Le bénévolat était le seul moyen pour moi de faire face à la culpabilité», raconte un bénévole en Russie au «Washington Post».

Comme le rapporte le quotidien étasunien, il existe un réseau de volontaires en Russie pour aider les 2,9 millions de réfugiés ukrainiens. Mais de manière non officielle. Car se faire enregistrer comme réfugié en Russie implique de demander le passeport russe et d’obtenir une attestation d’asile. Essayer d’entrer ensuite en Europe est quasiment impossible.

De nombreux Ukrainiens et Ukrainiennes ont perdu leur maison à la suite de l'invasion russe dans leur pays.
Photo: IMAGO/ZUMA Wire
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La fuite illégale par la Russie comme seule solution

Les volontaires, souvent des personnes d’origine ukrainienne, puisent de l’espoir dans leur travail et souhaitent que la guerre prenne fin. «J’espère que dans 20 ans, je pourrai peut-être me rendre en Ukraine sur les tombes de mes parents ou de mes frères et sœurs», espère dans les colonnes du «Washington Post» une bénévole qui a grandi en Ukraine.

Bien que ce soutien ne soit pas illégal, les citoyens qui se montrent solidaires avec les Ukrainiens prennent des risques. Le simple fait de critiquer «l’opération spéciale Z» peut conduire à des arrestations. L’ambassadrice des États-Unis aux Nations unies Linda Thomas-Greenfield a en effet déclaré qu'«il existe des preuves croissantes et crédibles de la disparition de ceux qui sont considérés comme une menace en raison de leurs supposés penchants pro-ukrainiens».

D’un point de vue purement géographique, certains Ukrainiens ne peuvent s’enfuir qu’en passant par la Russie, même si de petits groupes se décident à y aller volontairement parce qu’ils sont prorusses. La fuite illégale vers l’Europe par le biais d’aides russes reste pour beaucoup la seule chance de retourner en Ukraine un jour.

Cela est pourtant risqué: «De nombreux réfugiés se sont vu retirer leurs papiers d’identité ou ont dû signer un document attestant qu’ils se détachaient de l’Ukraine», écrit le «Center for Strategic and International Studies» (CSIS).

«Pour l’Ukraine, je suis une traîtresse. Pour moi, c’est de la survie»

En Russie, les réfugiés ukrainiens qui ont échappé à la guerre continuent de souffrir. «The Insider» a parlé anonymement avec des réfugiés ukrainiens dans des villes russes. À leur arrivée, leurs téléphones portables ont été contrôlés afin de vérifier leur position politique.

Mais les réfugiés prorusses se plaignent également. «Personne ne nous embauche», raconte une Ukrainienne. Vladimir Poutine avait pourtant ordonné aux autorités de donner des emplois aux demandeurs d’asile. Une autre Ukrainienne raconte que ses diplômes n’ont pas été reconnus.

Une réfugiée raconte comment elle, sa fille et sa mère ont été accueillies à bras ouverts dans un monastère russe. C’était propre, il y avait assez à manger et on s’occupait d’elles. Mais seulement tant que des journalistes venaient pour faire des reportages. Une fois les caméras parties, les habitants du monastère se sont plaints des réfugiés qui consommaient de l’électricité et de l’eau.

Le retour en Ukraine n’est néanmoins pas une option. «Pour l’Ukraine, je suis une traîtresse, raconte la femme à 'The Insider'. Pour moi, c’est simplement de la survie.»


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