Avec une exception pour la Suisse?
Mark Zuckerberg menace de fermer Facebook et Instagram en Europe

En raison de litiges sur la protection des données, Mark Zuckerberg a évoqué une possible fermeture de Facebook et Instagram en Europe. Les entreprises européennes tremblent devant les conséquences. La Suisse pourrait-elle bénéficier d'un traitement de faveur?
Publié: 08.02.2022 à 06:33 heures
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Dernière mise à jour: 08.02.2022 à 10:17 heures
Sarah Frattaroli

Mauvaise nouvelle pour les 309 millions d’utilisateurs de Facebook et les 130 millions d’utilisateurs d’Instagram en Europe: la maison mère de Facebook, Meta, pourrait bientôt décider de débrancher les Européens de son réseau! Son patron Mark Zuckerberg met en garde contre cette éventualité dans le rapport annuel de Meta qui vient de paraître.

Mais pourquoi Mark Zuckerberg voudrait-il se retirer de son plus grand marché? La faute à un litige sur les données des utilisateurs. Les données des utilisateurs européens de Facebook et d’Instagram sont actuellement transmises aux Etats-Unis, où elles sont stockées sur des serveurs américains et traitées ultérieurement.

Le cœur du problème: les données pour la pub personnalisée

Meta assure ainsi, entre autres, une publicité personnalisée. Par exemple: les personnes qui recherchent sur Google des vacances en Suisse, dans les montagnes, recevront dorénavant sur Facebook et Instagram des annonces publicitaires personnalisées pour des hôtels de montagne suisses. Pour l’empire en ligne de Zuckerberg, la publicité personnalisée est essentielle pour gagner de l’argent.

Le patron de Meta, Mark Zuckerberg, met en garde contre une fermeture de ses plateformes en Europe.
Photo: AFP
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Mais c’est précisément cette publicité personnalisée qui pourrait être mise à mal par une approche plus stricte de l’UE en matière de protection des données. La publicité personnalisée est régie par le bouclier de protection des données UE-États-Unis. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a toutefois déclaré ce bouclier invalide en été 2020.

Le bouclier de protection des données régit entre autres l’échange de données entre les serveurs européens et américains. Selon le jugement, il n’est toutefois pas suffisant. Ainsi, le FBI, la CIA et d’autres autorités américaines peuvent accéder aux données des utilisateurs européens sur les serveurs américains et ce même sans soupçon concret de délit.

Meta serait au bord de la faillite en Europe

Si aucun accord concernant la réglementation ne peut succéder au bouclier de protection des données, il ne sera plus permis de continuer à échanger des données pour la publicité. Ce faisant, Facebook et Instagram seraient au bord de la faillite en Europe, avertit Mark Zuckerberg dans le dernier rapport annuel de Meta.

Des litiges juridiques et d’éventuelles pénalités sont à craindre pour la société californienne. Ce n’est pas le premier avertissement de ce genre. Meta a aussitôt démenti que l’UE soit menacée de retrait. Il s’agit plutôt d’une mise en garde contre les risques liés aux litiges en matière de protection des données.

Réglementation spéciale pour la Suisse?

L’UE et Meta continuent toutefois de travailler à une solution de remplacement pour le bouclier de protection des données. La Suisse pourrait-elle devenir une île Facebook isolée en Europe? Pas vraiment. Le bouclier de protection des données Suisse-USA s’applique ici. Et son contenu s’appuie sur la réglementation de l’UE.

Après le jugement de la CJCE, le préposé suisse à la protection des données a fait savoir que le bouclier de protection des données Suisse-USA n’était plus suffisant. Formellement, il est toutefois toujours en vigueur.

«La dépendance vis-à-vis de Facebook fait peur»

Il est très improbable que Facebook et Instagram soient bientôt débranchés en Europe. Les deux parties ont besoin de cette coopération. D'un côté, Meta encaisse des recettes publicitaires en provenance de l’UE et de la Suisse.

De l'autre, le modèle commercial de nombreux groupes implantés en Europe dépend de Facebook et d'Instagram. Ce que la panne de six heures de Facebook et Instagram d'octobre dernier avait bien mis en évidence. En Suisse notamment, plusieurs entreprises s’étaient plaintes que la panne leur avait coûté beaucoup d’argent. «La dépendance de notre entreprise vis-à-vis de Facebook est effrayante», avait alors déclaré Nicholas Hänny à Blick. Pour sa marque de vêtements durable, 80% des dépenses publicitaires sont effectuées sur Facebook.

Tiktok en plein essor

Les autorités de l’UE ne sont pas les seules à gâcher les affaires publicitaires de Mark Zuckerberg. Le fabricant d’iPhone Apple serre lui aussi la vis en matière de publicité personnalisée sur ses appareils et rend ainsi la vie difficile à Meta.

Depuis l’année dernière, les fournisseurs d’applications doivent demander aux utilisateurs d’iPhone s’ils peuvent suivre leur comportement à travers différents services et sites web à des fins publicitaires. Ceux qui refusent reçoivent des publicités moins adaptées.

A cela s’ajoute le fait que de plus en plus d’utilisateurs des réseaux sociaux se tournent vers la plateforme vidéo chinoise Tiktok. Mark Zuckerberg a donc dû annoncer la semaine dernière, pour la première fois dans l’histoire de l’entreprise, une baisse du nombre d’utilisateurs. Ce qui a provoqué un séisme sur les marchés boursiers. Meta a perdu temporairement 20% de sa valeur.

(Adaptation par Alexandre Cudré)

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