Atterrissage incontrôlé
Jusqu'à 9 tonnes de débris d'une fusée chinoise vont retomber sur Terre

Le 24 juillet dernier, la Chine lançait dans l'espace un nouveau module pour sa future station spatiale. Mais il semblerait que le retour de ses débris sur Terre soit hors de contrôle. Le lieu du crash n'est pas connu, mais cela arrivera ce 31 juillet.
Publié: 29.07.2022 à 14:16 heures
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Dernière mise à jour: 29.07.2022 à 14:31 heures
Mathilde Jaccard

C’était «une opération délicate». Dimanche dernier, la Chine lançait son deuxième module dans l’espace, le laboratoire Wentian. Une étape cruciale vers la finalisation de la station spatiale Tiangong, littéralement «le palais céleste». Des milliers de fans de l’aérospatial étaient venus admirer le décollage. Mais une question flotte tout de même dans les airs: «Et si ça me retombait sur la tête?»

Si l’assemblage du module avec le reste de la station s’est déroulé dans les règles de l’art, le retour du reste de la fusée sur Terre semble flou… voire même incontrôlé, selon les précisions apportées notamment par le «Washington Post». Pourtant, ce n’est pas un détail: il s’agit tout de même de presque 9 tonnes de matériel de la fusée chinoise Chang Zheng 5B (Longue Marche 5B).

Pas de feux d’artifice pour la Suisse

Le lieu du crash ne peut pas être clairement défini, mais il aura bien lieu ce 31 juillet. Toutefois, soyez (un peu) rassuré, la Suisse ne semble pas être la destination de ce retour explosif. Comme pour le 1er Août de cette année, on sera dispensé du feu d’artifice chinois ce dimanche.

Le 24 juillet dernier, lors du lancement de la fusée Longue Marche 5B, des milliers de spectateurs étaient venus contempler l'événement à Wenchang, dans le sud de la Chine.
Photo: Zhang Liyun/AP

Les débris devraient rentrer dans l’atmosphère entre samedi soir et dimanche, aux aurores. La zone du crash est très large: elle comprend une grande partie de l’Amérique, l’Australie, tout le continent africain, le sud de l’Asie et le sud de l'Europe.

La Chine n’en est pas à son coup d’essai

Ce n’est pas la première fois qu’un lanceur chinois fait une entrée fracassante sur Terre. Selon Aerospace Corporation, une société américaine spécialisée dans l’aérospatial, la situation actuelle est semblable à celle du premier lancement pour Tiangong.

Le 29 avril 2021, la fusée Longue Marche 5B avait amené, comme prévu, le premier module dans l’orbite définie, mais son retour sur Terre avait été incontrôlé. La société américaine rappelle que «la trajectoire de la fusée a traversé plusieurs zones habitées et attiré l’attention du monde entier avant d’atterrir dans l’océan Indien, près des Maldives, le 8 mai».

Tentative d’explications de la perte de contrôle

Aerospace Corporation tente d’expliquer, de manière simplifiée, les raisons de cette perte de contrôle. Pour pouvoir assurer un retour sûr, le lanceur ne doit pas atteindre l’orbite: «Normalement, le premier étage d’une fusée et les moteurs qui l’accompagnent ne sont pas conçus pour atteindre une orbite. Leurs trajectoires sont planifiées de manière à ce que l’étage et ses moteurs tombent dans une zone sûre, généralement dans l’océan.»

Manque de chance, le lanceur actuel est de nouveau entré en orbite. Il est donc impossible de contrôler son retour sur Terre à moins de tenter une toujours risquée manœuvre de désorbitation. Un mot compliqué et barbare pour dire simplement: utiliser les moteurs de l’engin spatial pour le faire redescendre de l’orbite et le diriger vers une zone sûre sur Terre.

«Seulement» 5 à 9 tonnes

Aerospace Corporation tente de rassurer: non, pas toute la masse de la fusée ne va retomber au sol. Et heureusement, puisque le lanceur pèse environ 23 tonnes. L’entreprise américaine explique que «la règle générale veut que 20 à 40% de la masse d’un grand objet atteignent le sol, même si cela dépend de chaque objet. Dans le cas présent, on peut s’attendre à environ 5 à 9 tonnes.»

Difficile d’anticiper à l’heure actuelle le lieu où le module atteindra la surface terrestre. En l’état actuel, la fusée pourrait entrer dans l’atmosphère «n’importe où le long des trajectoires bleue ou jaune», selon l’entreprise américaine.

Cette carte donne la trajectoire du lanceur chinois et la fenêtre d'incertitude de son retour sur Terre. La ligne blanche définit simplement la limite du jour et la nuit.


Pas de panique!

Bien que cela puisse être effrayant, de nombreux scientifiques s’accordent à dire que le risque que les débris causent un danger est minime, selon le «Washington Post». Les spécialistes ajoutent que les chances pour que les débris atteignent une zone habitée sont faibles. Toutefois, ils dénoncent les risques inutiles encourus par la Chine.

Bill Nelson, administrateur à la NASA, avait notamment fait part de son avis lors du premier lancement chinois retombé dans l’océan Indien. Selon lui, la Chine «ne respecte pas les normes de responsabilité concernant ses débris spatiaux», peut-on lire dans le grand quotidien de la capitale étasunienne.

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