23 ans après les accords de Kumanovo
Le Kosovo est-il à l'aube d'un nouveau conflit sur son territoire?

Le conflit entre la Serbie et le Kosovo s'intensifie. Un convoi militaire serbe se dirige vers la frontière. Sommes-nous à l'aube de l'explosion d'une nouvelle poudrière en Europe de l'Est? Blick fait le point.
Publié: 13.12.2022 à 06:28 heures
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Dernière mise à jour: 13.12.2022 à 06:55 heures
Marian Nadler

Les tensions entre la Serbie et le Kosovo ne cessent de croître. Dans la nuit de dimanche à lundi, des images et des vidéos de mouvements de troupes dans la zone frontalière serbe sont apparues sur les réseaux sociaux. Est-ce la prochaine poudrière qui explose en Europe de l’Est?

Quelle est l’origine des tensions?

L’expert allemand Konrad Clewing, de l’Institut Leibniz de recherche sur l’Europe de l’Est et du Sud-Est, résume la situation en quelques mots: «La Serbie conteste l’existence de l’État du Kosovo.» Le Kosovo a déclaré son indépendance de la Serbie en 2008, mais Belgrade considère le pays encore aujourd’hui comme un territoire sécessionniste. En outre, le pouvoir en place à Belgrade soutient la minorité serbe du nord du Kosovo dans ses actions d'opposition à l'autorité de Pristina.

Le regain de tensions actuel découle des projets du gouvernement kosovar d'organiser des élections municipales le 18 décembre dans les régions à majorité serbe. Le principal parti serbe a immédiatement annoncé son boycott et lorsque les autorités électorales ont voulu commencer les préparatifs en début de semaine, des tirs et des explosions se sont faits entendre.

Le conflit entre la Serbie et le Kosovo s'intensifie-t-il?
Photo: Getty Images
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Qu'en disent les chefs de gouvernement des deux pays?

Les Premiers ministres des deux parties au conflit se fustigent mutuellement.

Le Premier ministre kosovar, Albin Kurti, n'a pas mâché ses mots: «Le président et le Premier ministre de Serbie ont menacé d’une agression militaire et ont demandé à l’armée serbe de revenir sur notre territoire. Nous ne cherchons pas le conflit, mais le dialogue et la paix. Toutefois, laissez-moi être clair: la République du Kosovo se défendra – avec toute sa force et sa détermination.»

Comment réagissent la Suisse et l’UE?

La Suisse est préoccupée par l’augmentation des tensions et l’érection de barricades, a fait savoir lundi le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sur Twitter. Les deux parties ont été invitées à prendre immédiatement des mesures visant à promouvoir une désescalade de la situation.

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Le représentant de l’UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, a fermement condamné les attaques. Toutes les parties doivent éviter toute «escalade» et sauvegarder la paix, a déclaré le haut fonctionnaire sur Twitter. Il a demandé aux Serbes du Kosovo d’enlever «immédiatement» les blocages.

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«L’Occident ne s’oppose pas assez fermement à la Serbie», critique l'expert Konrad Clewing. Cela s’explique par le fait que certains pays européens ne reconnaissent eux aussi pas l’indépendance du Kosovo. Il s'agit de la Roumaine, la Grèce, la Slovaquie, l'Espagne et Chypre.

Quelle est la probabilité qu'une guerre éclate?

«Je pense qu’une invasion est peu probable, explique Konrad Clewing. Car dans ce cas, la Serbie devrait se battre contre la KFOR dirigée par l’OTAN.» La KFOR est une force armée multinationale mise en place après la fin de la guerre du Kosovo sur mandat du Conseil de sécurité de l'ONU et dirigée par l’OTAN.

Au lieu de cela, l'expert estime que la Serbie va continuer à mener une guerre de l'ombre grâce à ses services secrets. Selon lui, les tensions de ces derniers jours doivent être comprises tout au plus comme un avertissement de la Serbie - et non comme une volonté de déclencher un conflit armé avec le Kosovo.

L'expert des Balkans,Konrad Clewing, estime que le risque d'une guerre entre les deux pays est faible.
Photo: Leibniz-Institut für Ost- und Südosteuropaforschung

Quid des soldats suisses présents au Kosovo?

Actuellement, 195 Suisses et Suissesses sont engagés dans la Swisscoy, le contingent de l'armée suisse au Kosovo.

Interrogé par Blick, le centre de compétences de l'armée Swissint à Stans (NW) a déclaré que les tensions entre le Kosovo et la Serbie n'avaient pour l'heure aucune conséquence directe pour les soldats suisses stationnés sur place.

Comment empêcher une escalade conflictuelle?

Du côté serbe, il est possible que Belgrade décide de continuer à saper l'indépendance du Kosovo - ouvertement ou de manière secrète. Du côté kosovar, il sera difficile pour Pristina de mettre en place ses institutions contre la volonté de la population d’origine serbe. Ce faisant, l’un et l’autre ne feraient qu’envenimer la situation.

Konrad Clewing est donc favorable à une solution européenne. «La police EULEX (ndlr: une mission civile menée par l'UE au Kosovo) et la KFOR doivent assumer en grande partie leurs responsabilités dans la région du conflit, en accord avec le gouvernement de Pristina.»

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