L'ex-candidate à la présidentielle répond
Après «Playboy», Ségolène Royal engage le duel avec Marlène Schiappa

Ségolène Royal, ex-candidate socialiste à la présidentielle française de 2007 n'est pas tendre avec Marlène Schiappa. Pour elle, les poses dans «Playboy» ne sont pas dignes d'une ministre. Même si le magazine fait un carton commercial.
Publié: 19.04.2023 à 19:30 heures
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Dernière mise à jour: 19.04.2023 à 21:11 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

Deux femmes fortes pour une seule république. Deux femmes françaises, symbole chacune de leur époque. D’un côté, Marlène Schiappa, 40 ans, l’une des premières recrues politiques d’Emmanuel Macron, aujourd’hui ministre chargée de l’économie solidaire, sur le devant de la scène médiatique après sa récente interview de «Playboy», dont elle fait la couverture. De l’autre, Ségolène Royal, 69 ans, ex-candidate socialiste à la présidentielle de 2007, battue par Nicolas Sarkozy, habituée aux polémiques tout au long de sa carrière politique, et auteure de «Refusez la cruauté du monde» (Ed. du Rocher).

Ces deux femmes-là ont toujours cherché à être au premier plan. Elles ont rendu jalouses leurs adversaires et beaucoup d’hommes. Elles mènent aujourd’hui, par médias interposés, un duel révélateur sur l’évolution de la politique au pays de Voltaire et de l’écrivaine féministe Simone de Beauvoir.

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Pour Marlène Schiappa, le goût de la polémique et le soupçon de s’occuper assez peu de ses ministères successifs. La quadragénaire originaire du Mans (Sarthe) ambitionne aujourd’hui, dit-on, la mairie de Paris pour succéder en 2026 à la socialiste Anne Hidalgo, très discréditée. Son entretien dans «Playboy», sur une douzaine de pages illustrées par des photos d’elle en robe blanche et froufrou (mais pas nue), fait le buzz depuis une dizaine de jours. Marlène Schiappa assume d’avoir été inspirée par l’actrice américaine Pamela Anderson. Elle a, dans ce magazine crée en 1950 aux États-Unis pour rassasier un public masculin de pin-up dénudées, choisi de parler de l’égalité femmes-hommes dont elle fut en charge, comme ministre, au début du premier quinquennat Macron.

L'ancienne candidate socialiste à la présidentielle Ségolène Royal a exercé plusieurs fonctions ministérielles. Elle vient de publier «Refusez la cruauté du monde» (Ed. Rocher).
Photo: DUKAS
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Elle est supposée, désormais, s’occuper d’économie sociale, dans un pays fracturé par la crise autour de la réforme des retraites. Elle est aussi accusée d’avoir négligé les conditions d’attribution de subventions publiques au sein d’un Fonds Marianne créé après la décapitation de l’enseignant Samuel Paty en octobre 2020 et géré par son ministère. Une plainte a été déposée par la maire de Paris. Bref, Schiappa dérange, et n’est pas célébrée pour sa compétence ministérielle.

Pour Ségolène Royal, l’éternel retour en politique. L’ancienne ministre socialiste, ex-compagne de l’ancien président François Hollande (ils ont eu quatre enfants), est en quelque sorte la Marlène Schiappa des années 80-90. Au tout début de sa carrière d’élue, «Ségo» avait posé en famille pour Paris Match, jouant à fond la carte people. Mais aujourd’hui, celle qui fut candidate à l’Élysée contre Nicolas Sarkozy est marginalisée. Elle a soutenu en vain le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon à la dernière présidentielle. Elle n’a jamais épargné Emmanuel Macron, même si ceux qui la connaissent bien affirment qu’elle attendait de lui un geste.

Le créneau de Ségolène? Les valeurs. Dans l’émission controversée «Touche pas à mon poste» de Cyril Hanouna, l’ex-élue a donc pilonné Marlène Schiappa. Pas digne d’une ministre de poser dans «Playboy», magazine qui a tant exploité les femmes. Pas digne d’une mère de famille. L’attaque est directe. Celle qui proclame dans son livre «le temps d’aimer est venu» n’a pas l’âme charitable.

Deux femmes de pouvoir

Cette rivalité entre deux femmes populaires en dit long sur la France, où le féminisme s’installe solidement en politique. La Première ministre est une femme, Élisabeth Borne, pour la première fois depuis Édith Cresson en 1991-1992. La nouvelle secrétaire générale du puissant syndicat CGT est une femme, Sophie Binet, 41 ans. La prochaine patronne du syndicat réformiste CFDT sera aussi une femme à partir de la fin juin, Marylise Léon. L’épouse septuagénaire du président de la République, Brigitte Macron, est présentée comme très influente.

Alors, de quel côté se ranger? Faut-il, comme Ségolène, la «féministe de papa» qui vante les valeurs, la famille, la rigueur républicaine? Ou faut-il, comme Marlène Schiappa, miser sur le «buzz», les réseaux sociaux, les nouvelles manières d’assumer son statut de femme de pouvoir?

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Ce duel serait anecdotique s’il n’y avait pas, en arrière-plan, l’actuelle polémique sur l’utilisation des subventions du Fonds Marianne, créé en 2021 pour financer les associations luttant contre la radicalisation islamiste en ligne. Marianne est l’égérie de la République française. Son buste est partout dans les mairies, les assemblées, les ministères. Elle figure sur des tableaux célèbres comme «La liberté guidant le peuple» de Delacroix, que Marlène Schiappa a imité devant l’objectif des photographes. Elle se dresse place de la République, à Paris.

Qui honore le mieux Marianne en 2023? L’influenceuse Marlène ou l’austère Ségolène? Cette dernière, en tout cas, montre qu’elle garde ses distances avec sa promesse, dans son livre, de faire appel au «miracle de la gentillesse». Ses flèches font toujours mal. Au pays de Jeanne d'Arc, les femmes de pouvoir sont toujours des guerrières. Quelle que soit leur tenue en couverture des magazines.

A lire: «Refusez la cruauté du monde» de Ségolène Royal (Ed. Rocher)

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