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Des spécialistes surpayés
Les salaires exorbitants de certains médecins font-ils exploser les primes?

En parallèle des primes maladie qui montent en flèche pour 2024, certains salaires de spécialistes sont exorbitants. Corrélation directe?
Publié: 05.10.2023 à 16:30 heures
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Dernière mise à jour: 05.10.2023 à 16:36 heures
Tiffany Terreaux

8,7% d’augmentation, ça fait mal. La hausse moyenne des primes maladie pour 2024 est un véritable coup dur pour le budget des ménages. En Suisse romande notamment, certains cantons — Vaud en tête de liste — sont particulièrement touchés avec des hausses de près de 10%.

Directement pointés du doigt, les coûts de la santé sont en forte augmentation dans plusieurs secteurs. Les consultations médicales ne sont pas plus nombreuses par patient, mais plus coûteuses. Quant aux séjours hospitaliers et aux médicaments, c’est autant leur prix que leur consommation qui augmentent.

Mais un autre focus, moins évident de prime abord, peut être fait sur les salaires — parfois exorbitants — de certains médecins spécialistes. En tête de file, le revenu moyen des neurochirurgiens indépendants s’élève à 818’000 francs par an, selon une étude réalisée par l’OFSP en 2018. S’ensuivent les gastro-entérologues avec 684’000 francs et les oncologues avec 600’000 francs. Une nette différence avec les médecins de premier secours qui gagnent en moyenne 264’000 francs.

En Suisse romande, certains cantons — Vaud en tête de liste — sont particulièrement touchés avec des hausses de primes maladie de près de 10%.
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Un problème de fond

D’après Yannis Papadaniel, responsable santé à la Fédération Romande des Consommateurs (FRC), l’enjeu se focalise sur la source de ces revenus. En ce qui concerne les interventions en stationnaire, elles sont rémunérées au forfait.

En ambulatoire, les médecins fonctionnent par tarification à l’acte. Leur revenu dépend des prestations fournies, le temps de consultation est limité et les suppléments de facture ne peuvent être justifiés qu’en proposant des actes ou des examens supplémentaires. C’est un incitatif à la surprescription.

«On sait qu’il y a des disparités de rémunération entre spécialités médicales, affirme le responsable de la FRC. La médecine de premier secours coûte beaucoup moins cher et est pourtant en mesure de régler les deux tiers des cas. Elle souffre de pénurie, n’est pas suffisamment promue financièrement, contrairement à certaines spécialités médicales, plus lucratives, qui fournissent un volume de prestations parfois superflu.»

Un choix coûteux

Il existe donc une corrélation entre la hausse des primes maladie et l’augmentation constante de ces prestations non essentielles dont une partie couvre les charges mais aussi le salaire des spécialistes.

Interviewé récemment par Blick, Philippe Eggimann, vice-président de la Fédération des médecins suisses (FMH), avançait une autre cause à cette hausse: «Ce qui coûte cher aux primes, c’est que l’on transfère de plus en plus d’actes médicaux auparavant pratiqués à l’hôpital en ambulatoire. Dans un hôpital, la prise en charge est payée à 55% par le canton et à 45% par l’assurance. En ambulatoire, l’assurance assume 100% du coût.» Ce qui expliquerait pourquoi la hausse est plus élevée en Romandie, les cantons francophones ayant pris de l’avance pour transférer la médecine vers l’ambulatoire.

Le modèle jurassien

Au vu du contexte, certains cantons ont empoigné le problème et pris des mesures en conséquence, le Jura notamment. Son Gouvernement tient compte de la prime la meilleure marché en modèle «médecin de famille» avec la prise obligatoire de médicaments génériques comme montant de référence pour l’attribution des subsides auprès des assureurs maladie.

Quant aux couples mariés et non-mariés, ils sont traités de manière égalitaire. Les revenus déterminants des parents vivant en concubinage sont cumulés pour établir le droit à la réduction des primes des enfants et adultes de moins de 25 ans en formation qu’ils ont en commun.

La question Tarmed

D'autres changements sont aussi à prévoir. Yannis Papadaniel souhaite une mesure, débattue au Parlement, visant à différencier la valeur du point tarifaire. Lorsqu’on observe un volume de prestations qui augmente sans justification médicale, il devrait être possible de baisser la valeur du point Tarmed pour la spécialité médicale en question et ainsi éviter les abus. Sans toucher aux spécialités dont le volume de prestations est justifié, Yannis Papadaniel y voit un bon moyen de promouvoir la médecine générale dont l’utilité médicale et sociale n’est pas à démontrer.

En parallèle, le responsable de la FRC défend le principe d'un gel des primes, sous forme de moratoire, afin que la hausse des coûts, liée notamment aux prestations médicales, ne soit pas uniquement répercutée sur les assurés.

Le fonctionnement Tarmed

La structure des prestations médicales Tarmed est une grille sous forme de tarification à l’acte. Pour la facturation à leurs patients, les médecins appliquent ce tarif uniforme, propre à chaque canton, qui comprend la quasi-totalité des prestations médicales et paramédicales fournies au cabinet et dans le domaine hospitalier ambulatoire.

Un nombre déterminé de points tarifaires est attribué à chaque prestation en fonction du temps nécessaire, du degré de difficulté et de l’infrastructure requise. En outre, le Tarmed fait la distinction entre la prestation médicale et la prestation technique.

La structure des prestations médicales Tarmed est une grille sous forme de tarification à l’acte. Pour la facturation à leurs patients, les médecins appliquent ce tarif uniforme, propre à chaque canton, qui comprend la quasi-totalité des prestations médicales et paramédicales fournies au cabinet et dans le domaine hospitalier ambulatoire.

Un nombre déterminé de points tarifaires est attribué à chaque prestation en fonction du temps nécessaire, du degré de difficulté et de l’infrastructure requise. En outre, le Tarmed fait la distinction entre la prestation médicale et la prestation technique.

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