Pimenté, fermenté
Qu'est-ce que le gochujang, et pourquoi tout le monde cuisine ce condiment coréen?

Cette pâte de piment fermenté n'a rien à voir avec les autres. Qu'est-ce qui fait sa particularité, et pourquoi est-elle si bonne?
Publié: 17.04.2024 à 18:28 heures
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Fabien GoubetJournaliste Blick

Pour moi, ça pique. C'est sucré aussi, et même fruité, mais aussi un peu salé. Un cocktail de saveurs qui change encore lors de la cuisson. Décidément, décrire le goût du gochujang n'est pas une sinécure.

Ce n'est pas Sarah Scalea, propriétaire du restaurant Daisuki à Lausanne, qui me contredira: «C'est vrai que c'est assez compliqué à décrire, s'amuse-t-elle. C'est à la fois relevé, un peu sucré, par contre moi je ne trouve pas que ce soit salé.» On ne peut pas être d'accord sur tout.

Encore inconnu par ici il y a une quinzaine d'années, le gochujang est devenu un des ingrédients indispensables de nombreux livres de cuisine. Si vous avez mangé du kimchi, un bibimbap, des tteokbokki, ou encore du poulet frit coréen une fois dans votre vie, vous avez forcément déjà goûté à l'explosion de saveurs procurée par le gochujang.

Le piment est mis à fermenter pendant au moins 2 à 3 mois dans des jarres en terre cuite, les onggi.
Photo: Shutterstock
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Qu'est-ce que le gochujang?

Le gochujang est un condiment phare de la cuisine coréenne. «C'est, avec la sauce soja et le doenjang [une pâte de soja fermentée, ndlr], la base de tous les assaisonnements fermentés de la cuisine coréenne», confirme Sarah Scalea. A ces aliments fermentés, elle ajoute le sésame.

Le gochujang est composé de piments rouges en flocons (le gochugaru), de pâte de soja, de pâte de riz gluant et de sirop de malt, parfois remplacé par du miel (dans ce cas, le gochujang n'est plus végan).

La particularité de cette «harissa coréenne», et ce qui fait toute la différence, c'est que les piments sont fermentés pendant plusieurs mois dans de grandes jarres en terre cuite (les onggi), comme les Coréens le font pour le kimchi (du chou fermenté). La lacto-fermentation apporte une complexité et des couches de saveurs qu'on ne retrouve pas dans d'autres purées de piments.

Il se présente sous forme d'une purée couleur carmin, de consistance assez dense, proche de la harissa, mais en un peu plus gluant (en raison de la farine de riz). C'est piquant, mais pas un piquant à vous détruire la bouche (le piment utilisé n'a que 1500 unités Scoville, soit un piment assez raisonnable). Il apporte plutôt une chaleur en bouche, et tout un bouquet de saveurs.

Comment utiliser le gochujang?

Le plus simple, c'est dans une sauce. La purée étant compacte, il vaut mieux la détendre avec du liquide. Jus de citron vert, vinaigre, ou de l'eau font l'affaire. Au Daisuki, Sarah Scalea utilise du bouillon, ou de la sauce soja, en prêtant attention à ne pas basculer dans le trop salé.

La meilleure porte d'entrée selon moi? Dans une mayonnaise! Dans un petit bol, mélangez 3 cuillerées à soupe de mayonnaise (maison de préférence), 2 cuillères à soupe de gochujang (commencez avec une seule, si vous craignez le piquant), ainsi que le zeste et le jus d'un citron vert. De manière générale, il se marie bien avec les matières grasses. Dans un beurre au gochujang, par exemple.

Cuit, le gochujang vous ouvre les portes d'un tout autre univers. En fondant dans un peu de gras, il va libérer d'autres strates de saveurs. On peut ainsi l'utiliser en début de cuisson, pendant que l'on fait suer ail et oignons, et/ou avec du gingembre. Il relève à merveille le riz sauté, le chou, et surtout les œufs. Pas besoin de faire compliqué: il suffit d'en mélanger quelques gouttes et le tour est joué. Au Daisuki, Sarah Scalea le sert aux côtés de ses bibimbaps. «Je conseille aux clients d'en mettre même s'ils n'aiment pas le piquant, car c'est la seule façon de «pimper» le bibimbap», assure-t-elle.

Le gochujang est-il bon pour la santé?

Comme beaucoup d'ingrédients de la cuisine coréenne, le gochujang est au centre de nombreuses vertus bénéfiques pour la santé, sans que cela soit indiscutablement prouvé scientifiquement. Toujours est-il qu'il constitue une bonne source de vitamines C et B2, et qu'il est pauvre en calories. C'est déjà ça.

Où acheter du gochujang, et comment le choisir?

On peut aujourd'hui en trouver dans les grands supermarchés suisses. 

On trouve ce genre de gochujang en supermarchés.
Photo: Shutterstock

Selon la télévision coréenne, il faut choisir les marques dont la liste d'ingrédients est la plus simple et de préférence dans des containers en verre: gochugaru (au moins 12%), sel, meju (la poudre de soja), riz. La source de sucre doit être du sirop de malt de riz plutôt que du sirop de maïs ou de glucose.

Enfin, les étiquettes de gochujang ont leur propre système de classification de piquant, complètement distinct de la plus fréquente échelle de Scoville. Elle va de 1 à 5 selon le nombre d'unités GHU (Gochujang Hot-Taste Units). Un rang 3 (de 45 à 75 GHU) correspond un gochujang moyennement piquant.

Et faire son propre gochujang, c'est possible? L'idée amuse Sarah Scalea. «Autour de moi, aucun de mes amis coréens n'en fait: c'est très long et très complexe.» Sans compter qu'un onggi dans la cuisine, ça prend de la place.

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